Ch1 : Facteurs d’évaluation des impacts environnementaux dans l’élaboration d’un Plan de Prévention des Risques Miniers.

 

C’est un outil d'aide à la compréhension des principaux processus à l'origine des pollutions minières qui en découlent. Il permet d'identifier les causes de nuisances environnementales, qu'il est possible de minimiser en mettant en œuvre suffisamment tôt des mesures appropriées.

 

Parmi ces causes, le contexte géologique du gisement, la nature des minéralisations et les processus géochimiques et biogéochimiques contrôlent les conditions environnementales qui prévalent dans les zones naturellement minéralisées avant toute intervention humaine, ainsi que les conditions résultant de l'exploitation et du traitement du minerai (facteurs anthropiques). Ces derniers en particulier, provoquent des perturbations du milieu naturel en stockant en surface d'importantes quantités de déchets solides qui sont à l’origine d'instabilités physiques et chimiques durables dans le temps. Celles ci peuvent à leur tour exercer des pressions sur les ressources naturelles, la biodiversité, provoquer la dégradation d'écosystèmes et avoir des impacts importants sur la santé.

 

1. Introduction

 

Les activités de l'industrie minière ont pendant des décennies constitué en Algérie, un des points d'appui du développement économique. Aujourd’hui, dans un contexte généralisé dans le monde de fermeture des mines encore en activité, on constate que les mines peuvent porter atteinte à l'environnement. Face à cette situation, les décideurs doivent, tant au niveau d'une surveillance que d'une éventuelle réhabilitation ou reconversion des anciens sites, prendre en compte les préoccupations du long terme liées en particulier à l'environnement pour répondre aux enjeux du développement durable.

 

Ce cours présente le contexte général d’un site minier et les éléments à considérer dans l’évaluation des impacts environnementaux potentiels lors de la réalisation d’un Plan de Prévention des Risques Miniers (PPRM). Il concerne exclusivement les risques de pollution induits par l’activité minière durant les phases de reconnaissance, de développement, d’extraction et de fermeture de site, ainsi que les travaux de traitements industriels du minerai réalisé sur le site minier.

 

2. Description des phénomènes induisant des pollutions chimiques

 

     2.1. LE CYCLE DE VIE D'UN SITE MINIER

 

La découverte de gîte (concentration métallique) économique nécessite généralement une intense exploration dans la première étape du déroulement d'une opération minière. Une fois les premiers indices découverts, les géologues déterminent la profitabilité du gisement à partir d'études sur sa taille et sa richesse. Si le gîte est économique, les travaux de développement et de construction des installations sont entrepris avant la réalisation de l'activité industrielle proprement dite d'extraction, et de concentration de minerais. La fermeture des installations (clôture et abandon) intervient à la fin du cycle de vie de l'opération.

 

Dans le passé et généralement avant les années 70, les aspects environnementaux d'une opération minière n’étaient pas pris en compte et la réglementation était peu exigeante. De nos jours, le respect de l’environnement fait partie du cycle minier qui comprend dès les premières étapes (fig. 1) des activités orientées sur la prévention (plan de fermeture) et la maîtrise des impacts résiduels (réhabilitation progressive) liés à l'existence des installations industrielles et des perturbations du milieu naturel.

 

Parmi ces impacts, la gestion des pollutions solubles et insolubles des eaux demeure un des enjeux majeurs des étapes qui succèdent à la clôture des opérations.

 

Les volumes concernés et la dimension du facteur temps attachés à un site minier contribuent à différencier les activités minières des autres activités industrielles.

 

Elles nécessitent la mise au point d'outils de prédiction, d'évaluation ou encore de monitoring qui doivent être appliqués pendant de nombreuses décennies. Des conditions géochimiques nouvelles en effet apparaissent généralement au cours du cycle de vie d'un site minier pour produire des impacts sur les eaux ou les sols pouvant présenter un risque sanitaire vis-à-vis des populations. Les modifications géochimiques apparaissent dans le temps lorsque l'environnement de matériaux change. C’est par exemple le cas lors de l’extraction de roches minéralisées et de leur passage d'un

 

milieu chimique réducteur profond à un environnement oxydant de surface, ou encore la transformation des conditions de pH d'un milieu (cas de l'acidification des cours d'eaux).

 

Fig 2 : Travaux et opérations d’une exploitation minière avec production des différents types de déchets.

 

2.2. ACTIVITÉS MINIÈRES GÉNÉRATRICES DE POLLUTIONS CHIMIQUES

 

Les activités minières constituent une filière industrielle dans laquelle peuvent se succéder différentes étapes. Comme le montre le schéma de la figure 2, les opérations mises en œuvre sur un site minier pour exploiter et valoriser un gisement peuvent être divisées en trois (ou parfois quatre) étapes principales :

 

- les travaux nécessaires pour donner accès au gisement, l'ampleur de ces travaux de

déblaiement (ou de découverture) dans le cas d'une mine à ciel ouvert et de percement de galeries,

puits ou descenderies pour une mine souterraine varieront énormément en fonction des caractéristiques du gisement. Les mines à ciel ouvert produisent en général beaucoup plus de stériles (en moyenne de l'ordre de 10 fois plus) que les mines souterraines davantage sélectives ;

 

- les travaux liés à l'extraction du minerai « tout venant » et à son tri préliminaire

(éventuellement nécessaire pour minimiser la quantité de roche stérile, ou « gangue », présente

dans le minerai « run of mine » ;

 

- un ensemble d'opérations de traitement, regroupé dans une usine d'enrichissement

(souvent appelée « la laverie »), utilisé pour séparer les phases minérales porteuses des éléments

valorisables de la gangue stérile ; le produit de l'usine, enrichi en élément valorisable s'appelle « le concentré ». Dans la plupart des cas, ce dernier constitue le produit marchand de la mine ;

 

- dans certains cas, une usine métallurgique (fonderie ou une usine de grillage) peut être

édifiée à proximité de un ou plusieurs sites miniers voisins pour séparer l'élément valorisable de son

minéral porteur et transformer le concentré en forme métallique.

 

           2.2.1. Les mines

 

Une mine (fig. 2) comprend tous les aménagements, ouvrages et équipements d'extraction, installations de traitement de minerai, haldes de stockage, prévisionnels et permanents, de matériaux et/ou de résidus, nécessaires pour l'exploitation et la valorisation d'un gisement.

 

Un gisement ne se définit pas en termes absolus, mais en termes relatifs à un marché économique. En effet, un gisement est une masse minérale, le minerai, ayant une concentration en un ou plusieurs éléments métalliques assez importante pour être exploitable avec profit dans un contexte économique donné.

 

La situation topographique, la géométrie et la morphologie du gisement détermineront la méthode minière utilisée pour son exploitation. Les deux grands types d'exploitation réalisés soit à ciel ouvert, soit en souterrain, provoquent des perturbations notables du milieu naturel.

 

a) Mines à ciel ouvert

 

L'exploitation d'un minerai à ciel ouvert est décidée en fonction du taux de découverture (ratio du volume de roche stérile qui doit être enlevé par volume de minerai), et n'est réalisable généralement que pour des minerais peu profonds (< 300 m). En général, après les travaux de décapage (enlèvement du sol et des horizons superficiels), les travaux de découverture concernent la partie stérile de la roche renfermant (ou encaissant) le minerai. Cette dernière est enlevée par gradins successifs dans une excavation souvent de forme conique dont les parois découpées en banquettes sont plus ou moins redressées suivant la tenue des roches. Plus l'excavation s'approfondit, plus le volume de stérile à extraire est important. Lorsque le taux de découverture devient trop important, une exploitation à ciel ouvert n'est plus rentable.

 

b) Mines souterraines

 

Dans le cas où une mine à ciel ouvert n'est pas possible, et si les teneurs du minerai le permettent, une exploitation en mine souterraine, méthode plus coûteuse, peut être mise en œuvre.

 

Dans ce cas, l'accès au minerai se fait par une ou plusieurs descenderies (cf. fig. 1). Si le gisement comporte une ou plusieurs couches de minerais horizontales dans une région à paysage plat, la desserte des galeries et la ventilation sont assurées au minimum par deux puits : l'un pour évacuer le minerai (skips) et l'autre pour le personnel, l'aération et l'exhaure des eaux. Dans le cas d'un gisement très redressé en zone de montagne, plusieurs galeries horizontales peuvent être tracées à partir du flanc de la colline – les travers bancs – pour rejoindre le minerai.

 

              2.2.2. Les usines de concentration de minerais

 

Une usine de concentration de minerai comprend les installations nécessaires à la mise en œuvre des procédés physiques et/ou chimiques destinés à conditionner, trier ou séparer les différentes substances minérales.

 

Les principales techniques de traitement utilisées sont les suivantes :

 

a) Procédés de tri physique

 

Basés sur les techniques utilisant la densité des particules ou leur susceptibilité magnétique, leur conductivité, etc., ces procédés se caractérisent d'une part par un broyage assez grossier du minerai (les tailles des particules vont de quelques millimètres jusqu’à 0,2 mm environ) et d’autre part par une absence de réactifs.

 

b) Procédés physico-chimiques de séparation

La flottation apparue au début du XXe siècle est la principale technique de séparation physico-chimique. Elle utilise une grande variété de réactifs chimiques, principalement pour modifier les états de surface (hydrophobie, hydrophylie) des particules. Elle nécessite également des particules suffisamment petites, de taille inférieure à 0,2 mm.

 

Les rejets de tels traitements sont donc constitués de produits fins renfermant des réactifs   

organiques et minéraux résiduels.

 

Les réactifs utilisés en flottation sont utilisés à des doses allant de quelques dizaines de grammes (tabl. 1) à quelques kilogrammes par tonne de minerai et se classent en :

 

Tabl. 1 - Principaux réactifs de flottation utilisés dans le traitement de minerai sulfuré avec leur consommation dans le cas de deux mines françaises de Pb-Zn

 

- moussants (tensioactifs organiques) ;

- collecteurs (tensioactifs organiques de type xanthates et dithiophosphate) ;

- agents modifiant le pH (acide sulfurique, chaux…) ;

- activants et dépresseurs (produits minéraux de type sels métalliques: Bichromate, CuSO4, Zn SO4, Fe² (SO4)3 etc., ou produits organiques de type cyanure de sodium ou amidon).

 

Ces réactifs de flottation se retrouvent, au moins en partie dans les résidus issus de ces traitements.

 

c) Procédés chimiques d'extraction/concentration

 

De tels procédés recouvrent à la fois les techniques de lixiviation (dissolution) et celles de récupération des éléments dissous (précipitation, cémentation...) et se caractérisent par une utilisation importante de réactifs chimiques (acides, bases, oxydants, complexants …).

 

Examinons les procédés chimiques qui ont principalement été employés pour l'uranium et pour l'or.

 

En ce qui concerne l’or, deux principaux procédés ont été mis en œuvre :

 

- la cyanuration repose sur une mise en solution de l'or et de l'argent, par complexation par du cyanure (KCN ou NaCN). La mise en solution de l’or et sa récupération se fait :

 · par arrosage avec la solution cyanurée de tas de minerais de quelques dizaines de milliers de

tonnes réalisés sur le site de la mine et déposés sur une surface synthétique imperméable ;

· récupération au bas du tas de la solution enrichie en or ;

· recyclage de la solution pendant n x 10 jours jusqu’à ce que la totalité de l’or récupérable soit passé en solution ;

· l’or en solution est ensuite récupéré de la solution enrichie par précipitation avec de la poudre de zinc, ou sur du charbon actif.

La mise en solution peut aussi se faire en agitant le mélange de minerais avec la solution cyanurée et du charbon actif dans des cuves de grand volume pendant un temps donné.

 

Le cyanure très toxique est utilisé à des teneurs de 0,02 à 0,08 % et se retrouve dans les résidus stockés sur le site de la mine (spent ore). En contact avec l'atmosphère, il se détruit par action photochimique, mais auparavant il est aussi dispersé par les eaux de ruissellement hors des tas de minerais traités.

 

- l'amalgamation consiste à réaliser par simple contact un alliage de mercure et d’or.

 

L’objectif est de collecter, et donc de concentrer, les plus fines particules d’or d’un minerai ou d’un concentré pour ensuite le récupérer par évaporation du mercure.

 

La présence de ce réactif dans les rejets solides constitue l'un des principaux dangers associés aux anciens résidus d'exploitation de l'or, ou encore aux sols des sites ayant accueilli les installations.

 

En ce qui concerne l’uranium

 

- la lixiviation du minerai brut se fait soit par arrosage de minerais en tas soit par contact dans des cuves agitées. Les solutions utilisées dépendent de la forme minéralogique de l’uranium et de la gangue. Ce sont des solutions acide en présence d’agent oxydant (Mn) ou alcaline (carbonate de soude) ;

- l'uranium mis en solution est ensuite soit fixé sur des résines échangeuses d’ions soit précipité pour former de l'uranate de magnésie, de diuranate d'ammonium ou d'uranate de soude (souvent désignés sous le nom de "yellowcake") ou une solution de nitrate d'uranyle.

 

                 2.2.3. Les usines métallurgiques

 

Dans une usine métallurgique, on met en œuvre des procédés de fusion (pyrométallurgie) ou de mise en solution (hydrométallurgie) pour produire un métal pur (produit marchand) :

 

- les procédés thermiques utilisés en pyrométallurgie consistent principalement en des grillages en milieu oxydant en présence de chlore, de minerais ou de concentrés de minéraux. Ces procédés engendrent non seulement des produits de grillage (scories), mais également des suies et nécessitent l'ajout de réactifs (fondants : fluorine, borax [Na2B4O5(OH)4.8H2O], cryolite

[Na3AlF6]...) ;

 

- les procédés hydrométallurgiques, qui tendent à remplacer les précédents notamment dans le domaine des métaux précieux et les métaux de base (zinc par exemple), permettent une véritable « distillation » des matières dissoutes, soit par précipitation sélective, soit par solvants, soit par échange d'ions. Souvent, pour certains minerais ou concentrés, il est nécessaire d'effectuer un grillage avant la mise en solution (lixiviation) de manière à produire un oxyde, un produit réduit ou un chlorure.

 

    2.3 PRINCIPALES SOURCES POTENTIELLES DE POLLUTION CHIMIQUE

 

           2.3.1. Les travaux et ouvrages d'exploitation (phot. 1)

 

Les vides souterrains et les excavations en surface créés pour accéder aux gisements constituent un premier type de source de pollution. En effet, le lessivage et l'érosion des parois de tels ouvrages par les eaux d'infiltration ou les eaux de ruissellement créent les conditions à l'origine de la contamination des eaux d'exhaure.

 

Phot. 1 - Mine à ciel ouvert de Laurieras (Haute-Vienne).

 

           2.3.2. Les eaux d'exhaure (phot. 2)

 

Les eaux d'exhaure sont produites lorsque le niveau piézométrique d'une nappe est plus haut que celui de travaux souterrains ou que le fond d'une mine à ciel ouvert.

 

Quand cela se produit, l'eau doit être pompée dans les ouvrages miniers ou aux alentours dans des puits, de manière à créer un cône de dépression et réduire les infiltrations. Lorsque la mine est opérationnelle, les eaux d'exhaure doivent être continuellement pompées pour permettre l'extraction du minerai. Cependant, une fois les opérations minières terminées, la gestion de ces eaux souvent s'interrompt et provoque des mises en charge hydrauliques dans les fractures et les ouvrages miniers (galeries, travers bancs, carrières). Ces eaux sont à l’origine des phénomènes d’oxydation et de dissolution des minéraux, mais elles sont surtout le vecteur des contaminants vers la surface et les eaux de nappes souterraines. Elles provoquent aussi le gonflement de certain minéraux (argiles) et leur changement de viscosité qui ont évidemment d’importantes conséquences sur la stabilité des terrains.

Phot. 2 - Eaux d'exhaure acides et ferrugineuses de l'ancienne mine d'or du Chatelet.

                       2.3.3. Les déchets miniers

 

a) Les différents types

 

Les déchets miniers peuvent être définis comme tout produit ou dépôt qui résulte de la recherche et de l'exploitation minière ou du traitement du minerai. Ces résidus peuvent être des produits naturels (stériles francs, produits minéralisés non exploitables) ou des produits artificiels, issus des phases de traitement et d'enrichissement du minerai (rejets de laverie) contenant d'éventuels additifs chimiques, minéraux ou organiques, ou générés lors d'une étape de fusion métallurgique (scories).

 

Près de 90 % des matériaux excavés d'une mine correspondent à des résidus solides généralement

disposés en surface. L'intégrité des ouvrages de stockage et le devenir des matériaux qu'ils contiennent constituent aujourd'hui un des enjeux majeurs des phases de fermeture et post-fermeture d'une mine.

 

Comme nous le verrons, la nature et l'importance des éventuels impacts qu'un déchet minier peut avoir sur l'environnement seront fonction de :

- sa quantité totale ;

- ses caractéristiques chimiques et minéralogiques ;

- ses caractéristiques physiques ;

- la méthode de stockage et sa localisation dans un contexte environnemental donné.

 

Ces différents aspects sont fortement influencés par les caractéristiques de la mine elle-même, et en particulier par :

- la substance exploitée ;

- la nature du gisement (types de minéralisation primaire et secondaire) ;

- sa taille et la méthode d'exploitation utilisée ;

- les caractéristiques des roches encaissantes ;

- les procédés de traitement du minerai employés et les réactifs utilisés ;

- sa localisation dans un contexte environnemental particulier (hydrogéologique, hydrologique, physiographique..).

 

Chacune des étapes d'exploitation présentée dans la figure 3 peut être génératrice de résidus miniers, généralement de caractéristiques physiques et chimiques, donc d'impact environnemental potentiel, très différentes. Leurs volumes respectifs, surtout en ce qui concerne les résidus de découverture, seront fonction aussi du type d'exploitation (mine à ciel ouvert, mine souterraine) et leur composition chimique variera en fonction de la substance exploitée et la nature du gisement.

 

Nous pouvons classer les principaux types de résidus miniers en quatre grands groupes (fig. 3) (photos 3, 4, 5 et 6) :

 

- les stériles francs de découverture et/ou de traçage de galerie ;

- les résidus d'exploitation (stériles francs et/ou stériles de sélectivité minéralisés) ;

- les résidus de traitement (rejets de l'usine de concentration) ;

- les autres résidus (scories de grillage ou de fusion du minerai).

 

b) Les stériles francs de découverture

 

Ce sont les sols et morts terrains qui recouvrent le minerai, décapés pour une mise en exploitation à ciel ouvert, ou les matériaux stériles extraits lors du percement de galeries, puits ou descenderies (fig. 1-A, B) dans le cas d'une mine souterraine.

 

Ces résidus contiennent, en règle générale, des teneurs en métaux et en éléments accompagnateurs faibles, de l'ordre de grandeur de l'anomalie géochimique produite par les phénomènes de dispersion naturelle, remaniement mécanique ou diffusion chimique des métaux du minerai dans sa roche encaissante. D'une certaine façon, les caractéristiques physiques et chimiques de ce genre de résidus ne se différencieront pas de celles des matériaux qui auront été remaniés lors de la construction de tout autre ouvrage d'art (autoroute, tunnel, barrage, etc.) dans le même contexte régional.

 

Fig. 3 - Les étapes d'exploitation d'un gisement métallique et les résidus miniers correspondants

 

Phot. 3 - Résidus d’exploitation stériles des niveaux supérieurs de la mine de

Tungstène de Salau (Ariège).

Phot. 4 - Résidus de traitement (cyanuration en cuve après amalgamation) de

l'ancienne mine d'or de Cheni (Haute-Vienne).

 

Phot. 5 - Résidus de traitement (tailings) (flottation) da l'ancienne mine de W de Salau (Ariège).

Phot. 6 - Résidus de lavage (Schlamms) d'une ancienne mine de charbon

(Bertholène).

 

c) Les résidus d'exploitation (stériles de sélectivité)

 

Lors de l'exploitation, le mineur opérera un tri précoce entre le minerai vendable et le minerai pauvre où la récupération des substances valorisables sera non économique dans un tel contexte.

 

Ce minerai pauvre pourra être stocké sur place, dans l'attente d'un traitement éventuel si les cours du métal venaient à monter. Dans les mines anciennes, la pratique était parfois de le mettre à part ou de le rejeter de la même façon que les autres résidus de la mine (fig. 1-C, E). Dans le cas de mines modernes de métaux de base, les stocks de ce type de résidus sont souvent traités en fin d'exploitation.

 

Le caractère plus ou moins disséminé d'un gisement conditionnera également la technique d'exploitation, donc le volume, la nature et l'importance des résidus d'exploitation. Dans un gisement de fer de type « disséminé » par exemple, l'exploitant placera la teneur limite d'exploitation du minerai à une valeur donnée (par exemple 28 % en fer). Cette limite est opérationnelle seulement quand la masse minérale exploitée présentera une gamme continue de teneurs décroissantes en fer suivant les conditions géologiques responsables de sa formation. Le résidu minier dans ce cas aura, en effet, des teneurs en métal très voisines du minerai. Par contre, pour les gisements de type « tout ou rien », il y a discontinuité géochimique brutale entre le minerai et sa gangue, celle-ci ne contenant plus que de faibles anomalies en métaux (approchant à peine le centième de la teneur du minerai). Dans ce cas, une exploitation du minerai ne laissera que des rejets pauvres, plus ou moins contaminés par des métaux et métalloïdes accompagnateurs du gisement.

 

d) Les résidus de traitement ("tailings")

 

La valorisation du minerai vendable consiste à effectuer plusieurs opérations de préconcentration

du ou des minéraux économiques. Ces opérations produisent plusieurs types de solides : l'un enrichi

en substances valorisables (le « concentré ») et un ou plusieurs qui en sont appauvris. Dans le cas des métaux de base et de l'or, les résidus sont généralement constitués de particules finement broyées, de sables fins et limons issus du traitement du minerai par gravité ou flottation. Ils sont souvent resédimentés dans des bassins de décantation retenus par des digues à résidus ("tailing dams") (fig. 1-F,G) ou déposés en terril. Afin de réduire les coûts de transport, l'exploitant localisera la laverie en aval de la mine (transport par gravité) et les rejets seront décantés dans le vallon sous-jacent, à l'amont d'une digue à résidus.

 

Les résidus et les boues issus d'une laverie conventionnelle correspondent à un

matériau contenant entre 40 et 70 % de liquide et de 30 à 60 % de solide. Ils contiennent fréquemment des teneurs significatives en éléments accompagnateurs ou en minéraux secondaires tels que les sulfures de fer, d'arsenic (respectivement pyrite [FeS2], mispickel [FeAsS], etc.) et leurs produits d'oxydation (sulfates, oxyhydroxydes...). Ils peuvent contenir également des concentrations résiduelles non négligeables en réactifs (ex : phosocrésols, xanthates, cyanures, mercure...) utilisés pour la séparation et la concentration en métaux valorisables.

 

Les résidus de lixiviation ("spent ore") sont formés, parfois sur une surface de plusieurs hectares, par des tas de minerais broyés ou concassés dont on a extrait les métaux par lixiviation ("heap leaching" par cyanuration pour les métaux précieux, "dump leaching" par utilisation d'acide pour le cuivre et l'uranium).

 

e) Autres types de résidus

 

Dans bon nombre d'exploitations anciennes polymétalliques (fer, cuivre, étain, plomb/zinc, or…), le minerai ou concentré était grillé ou fondu sur place pour éliminer certains composants (sulfures, par exemple) afin d'arriver à un produit marchand de qualité (fig. 1). Dans ces cas, on peut retrouver sur ces sites anciens des tas de scories qui forment un cas particulier de rejets. Des suies provenant du nettoyage des fours de grillage ou des conduits d'évacuation des fumées y sont fréquemment associées. Ces produits oxydés se retrouvent soit accumulés à proximité de la mine si le grillage était opéré sur place, soit souvent entassés à proximité de la fonderie.

 

              2.3.4. Les stockages d'hydrocarbures et de produits chimiques

 

Sur les sites miniers, différents types d'hydrocarbures sont utilisés comme carburant (fuel, gasoil, essence…) et comme lubrifiants ou produits de maintenance des engins et moteurs (huiles minérales, huiles de vidange, graisses, solvants, etc.). Ces produits sont généralement stockés dans des cuves aériennes et/ou souterraines ou conditionnés en fûts près des installations de maintenance.

 

Une grande variété de produits chimiques sont utilisés à différentes étapes de la production de minerais. Des explosifs sont tout d'abord utilisés lors de l'abattage et de la phase d'extraction. Ensuite, de nombreux réactifs peuvent rentrer dans les procédés de traitement que ce soit sous forme de réactifs de flottation (voir paragraphe 1.1.2 et tableau 1) ou réactifs entrant le processus de lixiviation et de précipitation des éléments dissous (cyanure de sodium, acides, bases, sels de métaux etc.). Enfin, un certain nombre de produits sont utilisés lors de l'étape d'affinage et de purification (par exemple : utilisation de fondants lors de la fusion de métaux).

 

    2.4. CARACTÉRISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES DES SOURCES DE POLLUTION

 

               2.4.1. Les éléments potentiellement toxiques

 

a) Principaux contaminants

 

Les principaux contaminants mis en jeu sont des substances chimiques inorganiques (métaux

lourds, nitrates, sulfates…) ou organiques (hydrocarbures, composées phénoliques, Phtalates et autres produits organiques industriels...), à l'exclusion de tout contaminant biologique.

 

b) Paramètres physicochimiques contrôlant le comportement des éléments potentiellement toxiques

 

La concentration en tel ou tel élément contaminant dans les eaux d'exhaure, les résidus miniers ou les sols, ne constitue qu'une première information sur le vrai risque posé pour l'environnement (fig. 4). Il est nécessaire, en plus, d'acquérir des informations sur trois paramètres physicochimiques déterminant le comportement de ces éléments dans l'environnement :

 

- la réactivité controlée par vitesse de dissolution des phases minérales porteuses, la précipitation

d'éventuelles phases secondaires, la granulométrie, la porosité des roches favorisant l'accès aux

agents d'altération, etc. ;

- la mobilité chimique vers les compartiments eaux et sols, controlée par la spéciation des éléments (AsIII/As IV, Cr VI/Cr III…), les phénomènes de sorbtion, de coprécipitation, de conditions Eh et pH, et d'une manière générale les déplacements des éléments à l'état dissout dans un fluide ;

- la dispersion physique ou l'aptitude d'un élément à se déplacer par des voies non chimiques comme par exemple le mouvement des particules en suspension dans les eaux superficielles, la sédimentation dans le lit des cours d'eaux ou encore le transport par voie aérienne (érosion éolienne ou émissions atmosphériques des usines métallurgiques par exemple).

 

Chacun de ces paramètres peut être mesuré en fonction des sites et des situations de manière à obtenir le maximum d'information sur la nature et le devenir des sources de pollution. Par exemple des tests de lixiviation effectués selon la norme X 31 210 peuvent être entrepris sur des rejets solides dans le but d'appréhender la nature et la quantité d'éléments mobilisables et disponibles dans l'environnement.

 

La figure 3 ci-après empruntée à K.S. Smith et I.O. Huyck (1999) illustre les interactions complexes entre les différents paramètres physico-chimiques et leurs rôles dans le transfert et le devenir d'un élément chimique (un élément métallique par exemple) depuis sa libération d'une roche ou d'un déchet (source) jusqu'à sa mise à disposition pour les organismes végétaux ou animaux (biodisponibilité) avec un éventuel effet néfaste sur ces organismes (toxicité).

 

Fig. 3 - Diagramme simplifié montrant les transferts et les relations entre métal contenu dans une roche et la toxicité (d'après Kathleen S. Smith et al., 1999, modifié).

 

c) Le Drainage Minier Acide (DMA) (phot. 7)

 

Les mines contenant des sulfures (mines polymétalliques et certaines mines de charbon) ainsi que les déchets miniers générés présentent une grande instabilité chimique des espèces minéralogiques contenues. Une fois exposés à l'air libre et à l'eau, la plupart des minéraux sulfurés subissent une bio-oxydation génératrice d'acide sulfurique et de fer ferrique s'accompagnant d'une solubilisation des éléments métalliques (Zn, Pb, Cu, Fe, As, Cd, etc.). Ces réactions donnent ensuite lieu à des

réactions d'oxydation, de dissolution, de précipitation et de recristallisation successives qui produisent de nombreux composés minéraux secondaires (oxyhydroxydes, oxyhydroxysulfates complexes, etc.). Ce phénomène évolutif, plus connu sous le nom de Drainage Minier Acide (DMA), est à l'origine de charges polluantes acides et/ou métalliques dans les eaux d'exhaure ou les eaux de ruissellement et constitue un des problèmes environnementaux majeurs de l'industrie extractive mondiale.

L'une des caractéristiques essentielles du Drainage Minier Acide est la durée. Les écoulements acides se manifestent pendant quelques années ou pendant quelques siècles, généralement jusqu'à épuisement de la source de sulfure. Ils apparaissent dès le début de l'exploitation et jusqu'à plusieurs années après la fermeture du site minier.

 

Phot. 7 - Exemple de drainage acide (eaux à pH de 3 riches en ions ferriques),

eaux d'exhaure de l'ancienne mine de W d'Enguialès (Aveyron).

 

                2.4.2. Cas particulier des résidus miniers

 

La gestion des résidus miniers (stériles et résidus fins de traitement) constitue un des problèmes environnementaux majeurs auquel doit faire face les exploitants miniers durant l'activité de la mine et surtout après la fermeture des opérations. Près de 90 % des matériaux excavés d'une mine correspondent en effet à des déchets qui dans le cas d'une mine à ciel ouvert sont généralement abandonnés en surface.

La grande diversité des déchets miniers produits est, comme nous l'avons vu, fonction des substances exploitées, des types de minéralisation et des modes de traitements qui souvent, sur un même site, ont évolué en fonction du temps. Cette variabilité pose le problème de la représentativité des caractéristiques physicochimiques des déchets rencontrés, leurs compositions minéralogiques et chimiques devenant spécifiques des sites où ils ont été produits.

 

a) Les éventuels contaminants présents dans les résidus miniers

 

Les déchets miniers peuvent renfermer d'éventuels contaminants chimiques provenant

de deux origines principales :

- les minéraux comprenant le minerai et sa gangue ;

- les réactifs utilisés dans les différentes filières de traitement.

 

Les déchets potentiellement susceptibles de poser des risques compte tenu de leur composition chimique sont donc :

- les stériles de sélectivité (minerai pauvre) ;

- les résidus de l'usine de traitement (résidus de laverie).

 

Les stériles de sélectivité « minéralisés »

En ce qui concerne les stériles minéralisés, le risque chimique éventuel sera déterminé surtout par la teneur en :

- sulfures de fer (pyrite [FeS2], pyrrhotite [FeS], marcassite [FeS2]) et autres sulfures de métaux, phases minérales à l'origine du DMA (voir ci-dessus) ;

- phases minérales comprenant des éléments traces plus ou moins toxiques (arsenic, métaux lourds...).

De ce fait, nous pouvons focaliser notre attention dans la plupart des cas sur les résidus des mines

métalliques, et certains minéraux industriels (fluorine [CaF2], barytine [BaSO4], pyrite, andalousite

[Al2SiO5]...).

 

Tabl. 2 - Principales espèces minérales des minerais français et spectre des éléments traces associés

 

Comme le montre le tableau 2, si la composition minéralogique des principaux minerais extraits en France est relativement simple, le spectre d'éléments traces qu'ils renferment est plus large. Parmi les métaux et non métaux cités dans les normes et/ou directives européennes concernant l'évaluation de la qualité des eaux et des sols pour différents usages, 11 sont fréquents dans les gisements français : As, Cd, Co, Cr, Cu, Hg, Mo, Ni, Pb, Se, Zn, soit comme constituants principaux de minerais, soit comme accompagnateurs dans la gangue.

 

Les résidus de l'usine de traitement

La composition chimique des rejets issus du ou des traitements du minerai dépendent du minerai (éléments chimiques majeurs ou mineurs, minéraux présents dans le minerai de départ et se retrouvant dans les résidus…), mais également du procédé utilisé lors du traitement.

 

Pendant l'époque préindustrielle, les procédés de concentration de minerai ont peu évolué et les rejets, bien que souvent riches en métaux ou fortement pollués (cas du mercure dans les anciennes exploitations d'or où le minerai était traité par amalgamation), ont eu un impact relativement limité sur l'environnement, car les volumes en jeu étaient très réduits et les minerais traités souvent déjà oxydés. Par contre, l'utilisation à partir des années 1920 de procédés industriels combinant

l'utilisation de réactifs chimiques et des broyages fins, comme par exemple la flottation des sulfures, a augmenté considérablement les risques sur l'environnement.

 

    2.5. LES IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

 

            2.5.1. La notion « relative » d'impact environnemental

 

Il importe d'attribuer aux différents impacts miniers une hiérarchie qui soit représentative de leur réelle importance, par comparaison :

- aux impacts des autres activités industrielles ;

- au point zéro naturel ;

- à la durée de ces impacts et à leur évolution dans le temps, voire à leur prise en compte dans les

différentes phases de la vie de la mine par des mesures spécifiques préventives, curatives ou de confinement.

 

On doit ainsi distinguer le cas échéant l'impact non nuisible (ou marquage), l'impact nuisible de

nature chimique (ou pollution), et l'impact nuisible de nature physique (ou nuisance).

 

La notion d'impact environnemental ne prend tout son sens que si elle inclut un changement des

paramètres environnementaux, suite à une activité minière. Ces paramètres, qui régissent la «

qualité de l'environnement », peuvent avoir plusieurs composantes :

- la composition chimique des eaux, des sols, des sédiments, etc ;

- la diversité biologique ;

- les qualités esthétiques visuelles ; etc.

 

Pour être en mesure de juger le degré d'impact, il faut donc :

- que chaque composant soit exprimé en termes d'un paramètre quantifiable (pH, concentration d'un élément métallique, quantité de matières en suspension, mesure de diversité biologique…) ;

- que la valeur mesurée puisse être comparée à la gamme de valeurs « naturelles » du paramètre pour l'environnement du site minier, c'est-à-dire à ceux qui auraient existé avant les travaux miniers (« premining conditions »).

 

En effet, toute enquête visant à déterminer l'impact réel d'une exploitation minière (pollution anthropique) aura besoin au préalable d'une connaissance aussi précise que possible de l'environnement naturel du site avant l'exploitation. Cela est particulièrement important dans le cas d'un impact environnemental dû à une éventuelle contamination par les éléments présents dans le minerai et/ou son encaissant car, comme évoqué précédemment, le site peut être situé dans un contexte d'anomalie naturelle exprimée en termes de concentrations « anormalement élevées » d'éléments divers dans les roches, les sols et les sédiments et/ou dans les eaux de surface et souterraines. Dans ce cas particulier, nous avons besoin de prendre en compte le « fond géochimique » de l'environnement du site.

 

             2.5.2. Les différents types d'impacts environnementaux

 

Les impacts environnementaux d'origine minière ayant des conséquences néfastes sur le court terme sont bien connus, mais la longévité du cycle de vie d'une exploitation, les volumes considérables de déchets produits sans aucune comparaison avec d'autres industries et la durée des réactions géochimiques mises en jeu expliquent l'importance des impacts sur le long terme.

 

La nature et la gravité des éventuels impacts environnementaux du type « contamination chimique » avec « effets toxicologiques ou éco-toxicologiques » varieront selon qu'un rejet solide ou liquide contiendra ou non des composants chimiques capables :

- de changer de façon significative et adverse la composition chimique des ressources en eaux (de surface, souterraines) et/ou les sols et sédiments ;

- et/ou d'avoir des effets négatifs sur la flore, la faune et la chaîne alimentaire affectant la santé humaine.

 

Dans le cas d'une mine contenant des composés chimiques potentiellement polluant dans les dépôts de résidus solides et/ou dans les eaux d'exhaure, les perturbations du milieu naturel seront multiples et pourront affecter à des degrés divers, les différents compartiments de l'environnement.

 

a) Vers les compartiments de l'écosystème aquatique (phot. 8)

 

Phot. 8 - Tailings transportés et re-sédimentés sur les berges d'une rivière (Enguialès - Aveyron).

Les principaux impacts sont les suivants :

 

- une contamination chimique des eaux de surface et/ou souterraines par les substances

dissoutes ou les matières particulaires. Le « DMA » (cf. § 2.4.1.), par exemple, pourra être

responsable de l'acidification d'un cours d'eau et des teneurs élevées en fer, sulfates et,

éventuellement en métaux dissous ;

- suite à l'érosion des haldes et des dépôts de résidus par les eaux de ruissellement :

· une source de matières en suspension (sédiments) entraînant une forte turbidité et une dégradation de la qualité des eaux et de la nature des fonds des cours d'eau en aval du site. Cela peut avoir d'éventuels impacts sur le régime des rivières à l'aval (sédimentation excessive), sur la flore et la faune naturelles et, donc, sur l'utilisation éventuelle de ces cours d'eau pour la pêche, la pisciculture, la baignade, etc. ;

· l'origine de rejets importants de matières solides contaminées dans le réseau de

drainage, les sols des versants ou les alluvions. Ces résidus peuvent renfermer à la fois des quantités non négligeables en éléments accompagnateurs présents dans le minerai (métaux lourds, As, etc.) et éventuellement, des quantités résiduelles significatives en réactifs chimiques ajoutés dans les filières de traitement ;

- suite à l'exploitation et au pompage (fig. 4), une modification durable des formations aquifères et des caractéristiques hydrodynamiques (perméabilité, débit, transmissivité, piézométrie, vitesse, gradient hydraulique...) des nappes souterraines. Le pompage de ces eaux peut entraîner de sérieuses perturbations sur le comportement des nappes (disparition des nappes superficielles) et sur le régime hydrique du réseau de drainage en surface (assèchement de zones

humides, tarissement de sources, rejets d'exhaure). La remontée des eaux dans les vieux travaux après exploitation peut s'accompagner de recharges des nappes concernées et provoquer d'éventuelles inondations. La gestion des eaux après fermeture des mines est donc aujourd'hui au cœur des préoccupations de l'administration et des collectivités locales.

 

b) Vers les compartiments sol et sous-sol

 

Les impacts correspondent à des séquelles d'origine chimique et physique et notamment :

- une contamination chimique induite par les retombées de poussières ou par les épandages de résidus pollués, de sédiments d’inondation, de produits chimiques ou d'effluents ;

- des phénomènes de subsidence ou d'affaissement liés aux cavités souterraines dans le cas d'exploitations non remblayées ou foudroyées ainsi qu'aux remontées des nappes.

 

c) Vers le compartiment air

 

L'impact est principalement matérialisé :

- par la dispersion éolienne de poussières volantes, donc de pollution pour les habitants et utilisateurs des espaces sujets aux éventuelles retombées aériennes ; les résidus de laverie peuvent être particulièrement sujets à ce type de transport hors site dû à la finesse des particules de ce genre

de résidu ;

- par des émissions de gaz dangereux (grisou, radon), par une importante baisse des taux d’O2 et l’accroissement concomitant des teneurs en CO2.

 

d) Vers le paysage (phot. 9)

 

Des modifications de topographie et des qualités « esthétiques » de l'environnement constituent les principaux impacts. Cela peut être le cas, par exemple, pour les vides laissés par les exploitations à ciel ouvert ou pour tous les résidus à volume important (stériles de découverture, d'exploitation, de laverie) dont les lieux de stockage n'ont pas été réaménagés (terrassement, revégétation, etc.).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fig. 4 - Modifications majeures des formations aquifères en rapport avec l’exploitation des mines.

 

 

Phot. 9 - Impact sur le paysage de déchets miniers rejetés à même la pente topographique (Enguialès).

                2.5.3. Les facteurs déterminants influençant les impacts environnementaux

 

La plupart des impacts qu'une mine peut avoir sur l'environnement résultent de la combinaison complexe et de l'interaction entre plusieurs facteurs de nature géologique et industriels.

 

a) Facteurs géologiques

 

Ces facteurs sont les plus nombreux puisqu'ils influencent la taille et la nature des conséquences d'une exploitation minière sur son environnement ou de son « comportement environnemental ».

 

Taille et mode de gisement

 

L'échelle des effets provoqués sur l'environnement généralement augmente avec la taille des gisements. Ceux-ci se présentent sous une grande variété de formes correspondant à des filons, stockworks, brèches, dissémination ou amas et lentilles de minéralisations massives.

 

Chaque type influence de façon différente l'accès et l'extension des agents d'altération (eaux météoriques et eaux souterraines) aux roches minéralisées qu'elles soient en place, en profondeur ou mises en dépôt en surface.

 

Les filons par exemple correspondent à des remplissages plus ou moins complets de fractures préexistentes qui peuvent en fonction de l'espace demeuré libre, favoriser ou au contraire inhiber les circulations d'eaux souterraines.

 

Les stockwerk et les brèches minéralisées sont formés par un réseau anastomosé de fissures, filons et filonets qui peut affecter de grands volumes de roches et donc correspondre à d'importants aquifères si leur perméabilité est élevée.

 

Les minéralisations disséminées sont composées de minéraux dispersés dans la roche encaissante induisant de grands volumes de roches en interaction avec les eaux souterraines.

 

Les minéralisations massives, sont comme leur nom l'indique, en général constituées par des sulfures massifs contenus dans peu de gangue. Les eaux circulant à la faveur des fractures et fissures recoupant ces masses minéralisées peuvent devenir fortement acides et transporter des éléments

chimiques indésirables ayant des concentrations très élevées.

 

Lithologie des roches encaissantes

 

Le type et la composition des roches encaissantes des minéralisations ont une influence directe sur

certains facteurs tels que la composition des eaux de drainage et des exhaures, ainsi que sur leur signature en éléments traces.

 

Ainsi par exemple, les eaux drainant des roches carbonatées (calcaires, dolomies, marbres, schistes et grès carbonatés) ou des roches contenant des minéraux aluminosilicatés réactifs (tufs volcaniques ou roches ultrabasiques) présentent une alcalinité modérée à élevée contribuant à la neutralisation d'eaux acides et à l'adsorption de métaux sur des particules.

 

Les caractéristiques physiques les plus importantes des roches sur le plan environnemental sont de deux types :

- la conductivité hydraulique, fonction de la porosité et de la perméabilité des roches (perméabilité liée à l'existence de pores ou de fissures), va contrôler la circulation des eaux souterraines et l'accès de celles-ci aux zones minéralisées ;

- l'aptitude au mouvement qu'il soit lent et continu (érosion, fluage...) ou rapide et discontinu (écroulement, glissement de terrain...) est fonction de la structure et de la texture de la roche (existence de structures planaires telles que schistosité, stratification, surface d'écoulement...), ainsi que de son contenu en argile (plus le contenu en argile est important, plus la propension au mouvement est élevée).

 

Cette caractéristique des roches encaissantes lorsqu'elles sont ramenées en surface, peut avoir des conséquences importantes sur la stabilité des ouvrages de stockage et en particulier sur les conditions de dépôt des résidus.

 

Type d'altération hydrothermale

 

L'altération hydrothermale est une caractéristique commune à beaucoup de gisements, et résulte d'interactions géochimiques entre les fluides hydrothermaux qui génèrent le gisement et l'altération des roches encaissantes. Elle comprend des assemblages minéralogiques caractéristiques des types de gisement (ex. : silicification d'épontes filoniennes, argilisation des porphyres cuprifères, développement de quartz-muscovite dans les gisements d'étain/tungstène, etc.). Elle a des conséquences importantes sur l'environnement puisqu'elle affecte à la fois les propriétés chimiques et physiques des roches encaissantes et donc leur comportement.

 

Nature du minerai : minéralogie primaire et gangue

 

Le minerai renferme des minéraux économiquement valorisables étroitement associés à des minéraux de la gangue souvent non économiques qui jouent un rôle clé dans la dispersion et la mobilité des éléments chimiques dans l'environnement :

- les minéraux générateurs d'acide correspondent aux sulfures et aux sulfosels qui deviennent instables en présence d'oxygène atmosphérique ou une fois exposés à la circulation d'eaux souterraines oxygénées. L'oxydation bactérienne catalysant les réactions constitue une des cause de l'auto-entretien et de la propagation du drainage minier acide (voir paragraphe DMA). La quantité d'acide produit est cependant fonction des types et de la quantité de sulfures présents dans le minerai, de leur résistance à l'altération, de leur contenu en fer et donc de la présence d'ion ferrique comme oxydant, ainsi que des espèces minérales secondaires induites par les phénomènes complexes de dissolution, précipitation et recristallisation ;

- les minéraux consommateurs d'acide correspondent à une grande variété de carbonates et

d'aluminosilicates développés dans le minerai pour former la gangue. Ils réagissent avec les minéraux précédents en consommant de l'acide durant l'oxydation des sulfures. Les carbonates alcalins comme la calcite, la cérusite, ou la strontianite, se dissolvent rapidement au contact de l'acide alors que les aluminosilicates comme les feldspaths ou les argiles ne réagiront pas avec les

eaux acides ;

- les minéraux porteurs d’éléments traces ;

- les minéraux sont constitués par des éléments chimiques majeurs tels que le soufre et le zinc par exemple pour la blende mais ils contiennent aussi des « éléments traces » dans leur réseau cristallin.

 

Bien qu’à des niveaux de concentrations très inférieurs ces derniers, tels que le mercure ou le

cadmium pour la blende prise en exemple, sont libérés dans l’environnement lors de la destruction

des minéraux et peuvent y jouer un rôle majeur au plan pollution. Si dans le cas de la blende, le Zn

mis en circulation dans les eaux et les sols n’est a priori pas dangereux, il en est par contre tout autrement pour Hg et Cd… ;

- à titre indicatif, nous citerons d'autres minéraux comme ceux possédant une structure fibreuse par exemple, (famille des amiantes : crocidolite, amosite ou celle des serpentines : chrysotile) qui peuvent induire, en cas d'inhalation, de graves problèmes sur la santé humaine.

 

Minéralogie secondaire (phot. 10)

 

- Sels solubles

 

On observe la formation d'une grande variété de minéraux solubles (sulfates, oxyhydroxysulfates…) résultant du phénomène d'oxydation des sulfures en contexte superficiel. Ces sels solubles sont à l'origine de problèmes de pollution des eaux et des sols car ils forment avec leur phase solide des réserves temporaires d'acide et de métaux. Durant les périodes humides (pluies ou neige), leur dissolution entraîne un relargage des substances potentiellement toxiques vers les différents milieux de l'environnement.

 

Phot. 10 - Exemple de minéralogie secondaire (sulfates de fer : mélantérite et sulfates de zinc) dans tailings de l'ancienne mine de Pb/Zn de Pierrefitte (Hautes-Pyrénées).

 

L'ensemble des réactions impliquées dans le phénomène de production de DMA et produisant de nombreux composés minéraux, est rappelé dans la figure 5 ci-dessous.

 

Fig. 5 - Schéma récapitulatif des réactions primaires et secondaires se déroulant au cours d'un phénomène de Drainage Minier Acide (d'après Nordstrom, 1982).

 

Les sels solubles secondaires se forment par évaporation des eaux acides. Par exemple, des

efflorescences ou des encroûtements sont fréquents à la surface des dépôts de tailings, sur les parois des anciens travaux miniers ainsi que sur les berges des ruisseaux ou rivières pollués.

 

- Précipitation de fer

 

L'oxydation du fer dans les eaux chargées en cet élément induit une précipitation d'hydroxydes ferriques rougeâtres et d'hydroxysulfates de couleur ocre. Dans le cas d'une sursaturation et d'une précipitation rapide, des particules en suspensions se forment et sédimentent dans le lit des cours d'eau. A l'inverse, lorsque la sursaturation en fer est minimale (cas d'eaux acides circulant par intermittence sur un sol par exemple), des précipités d'hydroxydes ferriques se déposent sur les

surfaces préexistantes pour former des ferricrêtes, croûtes ou indurations ferrugineuses

particulièrement résistantes à l'érosion. Ces matériaux supergènes peuvent piéger temporairement des éléments traces métalliques ou des éléments toxiques comme par exemple l'arsenic et les libérer à la faveur de modifications des conditions de pH et Eh (A. Courtin-Nomade, 2003).

 

- Étendue de la zone d'oxydation

La zone d'oxydation correspond à la partie superficielle non saturée du gisement soumis aux altérations météoriques. Dans cet horizon, les éléments constitutifs du minerai et d'une partie des roches encaissantes sont soit mobilisés en solution soit incorporés dans une grande variété de minéraux oxydés (oxydes et hydroxydes de fer, manganèse, aluminium, calcium, etc.) qui tendent à devenir relativement insolubles dans les conditions des eaux surface (eaux d'infiltration). L'extension de cette zone oxydée est fonction de la géologie, de la topographie et du climat, et peut réduire de façon significative le potentiel de production de drainage acide d'un gisement contenant des sulfures.

 

- Topographie et physiographie

 

La topographie et la physiographie d'un site sont déterminantes sur l'action des systèmes hydrologiques et le fonctionnement des bassins hydrologiques et hydrogéologiques (aquifère avec sa nappe d'eau souterraine).

 

Dans le domaine des eaux souterraines, elles déterminent en particulier la position et la forme des

nappes souterraines et par conséquent les paramètres hydrauliques (vitesse et direction de l'écoulement, variation de niveaux…) auxquels sont soumises les exploitations minières.

Si le sous-sol est imperméable, le chemin de l'eau ne sera déterminé que par la topographie. Le bassin versant d'un cours d'eau et de ses affluents (ou bassin hydrographique) sera alors limité par des lignes de crêtes et des lignes de plus grande pente.

 

- Hydrogéologie et hydrologie

 

Ces facteurs sont étroitement contrôlés par les caractéristiques géologiques des gisements et la nature des roches encaissantes. La lithologie, l'épaisseur des formations géologiques et leur perméabilité vont en effet déterminer la vitesse de l'infiltration et de la circulation des eaux ainsi que celle du transfert des polluants vers le milieu souterrain.

 

L'existence de formations karstiques carbonatées ou de milieux fortement fissurés (cas des skarns et des gisements filoniens par exemple) induit des types de nappe à fort débit avec des vitesses de transfert élevées. L'écoulement vers un cours d'eau se fera alors préférentiellement par les eaux souterraines. À l'opposé, des formations peu perméables de type argileux (cas des altérations argileuses associées aux minéralisations de type disséminé par exemple) constituent des barrières plus ou moins imperméables qui compartimentent le bassin hydrogéologique et retardent le

transfert des pollutions. Dans ce cas, c'est le ruissellement qui alimentera de façon préférentielle le réseau de drainage.

 

Dans tous les cas, le bassin versant (« watershed »), contrôlé par la topographie et la géologie, va correspondre à l'échelle pertinente des phénomènes qui se déroulent au niveau d'un permis minier ou d'un district regroupant plusieurs mines. Il va en particulier faciliter la compréhension des processus liés aux sources de pollution, à leur transfert et à leur transformation ainsi qu'aux effets potentiels induits sur les écosystèmes et les populations (périmètre des risques).

 

b) Facteurs industriels

 

Les techniques industrielles utilisées pour extraire et traiter les minerais sont très nombreuses et influencent de façon significative la nature, les volumes et la composition des rejets solides et liquides et des émissions atmosphériques.

 

Ces techniques, cependant, dépendent étroitement des caractéristiques géologiques et minéralogiques du minerai et peuvent changer durant la vie de l'exploitation en fonction de l'évolution des technologies.

 

Techniques minières

 

Les conséquences des techniques minières (à ciel ouvert ou en souterrain) sur l'environnement sont

liées à l'importance des perturbations physiques générées et au volume et à la nature des roches exposées à l'altération météorique. Ainsi une exploitation par puits et galeries d'un gisement filonien va générer un impact moindre (en termes de perturbation en surface comme en termes de production de déchets solides) qu'une exploitation à ciel ouvert d'un gisement à minerai disséminé ou massif.

 

Techniques de concentration des minerais

 

Les techniques de concentration de minerais ont fortement évolué ces dernières décennies pour permettre de traiter de plus grands volumes de minerais avec des teneurs plus basses. Deux facteurs importants vont influencer les impacts potentiels sur l'environnement. Il s'agit de la nature des produits chimiques utilisés (voir paragraphe 2.2.2) et la taille des particules générées dans les procédés (tailings et résidus de flottation par exemple). Cette dernière caractéristique correspond

à la surface spécifique des matériaux potentiellement polluants. Plus la taille des particules produites est faible, plus grandes sont la surface spécifique et la réactivité chimique des matériaux avec les agents d'altération. La finesse et l'homogénéité de la taille des particules des résidus de l'usine de traitement les rendent donc particulièrement susceptibles à une dispersion par l'eau et le vent dans l'environnement (dans le cas d'un lieu de stockage mal conçu et non réaménagé). Les

capacités de production d'acide, de matières en suspension, de polluants dissous, voire de poussières, sont ainsi maximales dans le cas de minerais sulfurés fins ou de tailings sulfurés.

 

2.6. TYPOLOGIE DES POLLUTIONS

 

Compte tenu de la diversité des cas rencontrés, on distingue en règle générale deux grands types de pollution :

- les pollutions diffuses, concernant d'importantes surfaces, qui proviennent essentiellement d'épandages de produits liquides ou solides (?). Elles sont également associées aux retombées atmosphériques (envol de poussières à partir de terrils par exemple) ;

- les pollutions ponctuelles, qui ne concernent a priori que des superficies limitées.

 

Parmi les pollutions localisées pour lesquelles on dispose d’informations chiffrées, on peut distinguer deux grandes catégories :

- les pollutions accidentelles, qui proviennent d'un déversement ponctuel dans le temps de substances polluantes. Elles engendrent en règle générale une dégradation brutale du milieu sur une surface limitée. Si aucune intervention n'est réalisée dans un délai relativement court, la pollution peut devenir rapidement catastrophique (ex. : débordement en février 2000 du tailing dam de la mine d'or de Baia Mare en Roumanie et pollution du bassin du Danube) ;

- les pollutions chroniques, correspondant à des apports de substances sur de longues périodes, qui ont souvent pour origine des eaux d'exhaure, des lixiviats et infiltrations issus de dépôts de résidus ou encore des fuites sur des conduites ou sur des bassins de stockage non parfaitement étanches.

 

3. Conclusions

 

Ce cours se veut un outil d'aide à la compréhension des principaux processus à l'origine des pollutions minières. Il permet d'identifier les causes de nuisances environnementales, qu'il est possible de minimiser en mettant en œuvre suffisamment tôt des mesures appropriées.

Parmi ces causes, le contexte géologique du gisement, la nature des minéralisations et les processus géochimiques et biogéochimiques contrôlent les conditions environnementales qui prévalent dans les zones naturellement minéralisées avant toute intervention humaine, ainsi que les conditions résultant de l'exploitation et du traitement du minerai (facteurs anthropiques). Ces derniers en particulier, provoquent des perturbations du milieu naturel en stockant en surface généralement sans précaution, d'importantes quantités de déchets solides à la source d'instabilités

physiques et chimiques durables dans le temps. Celles-ci peuvent à leur tour exercer des pressions sur les ressources naturelles et la biodiversité et provoquer la dégradation d'écosystèmes.

 

Les enjeux liés aux sites miniers abandonnés ou fermés dépassent aujourd'hui le simple cadre du débat public et de la mise en œuvre du « principe de précaution ».

 

Grandes consommatrices d'espace, les anciennes exploitations minières une fois sécurisées et

réhabilitées, peuvent être reconverties ou réutilisées par les collectivités territoriales mais selon des

règles et des procédures qui doivent être précisément définies dans les PPRM.

Ch1 : Facteurs d’évaluation des impacts environnementaux dans l’élaboration d’un Plan de Prévention des Risques Miniers.

 

C’est un outil d'aide à la compréhension des principaux processus à l'origine des pollutions minières qui en découlent. Il permet d'identifier les causes de nuisances environnementales, qu'il est possible de minimiser en mettant en œuvre suffisamment tôt des mesures appropriées.

 

Parmi ces causes, le contexte géologique du gisement, la nature des minéralisations et les processus géochimiques et biogéochimiques contrôlent les conditions environnementales qui prévalent dans les zones naturellement minéralisées avant toute intervention humaine, ainsi que les conditions résultant de l'exploitation et du traitement du minerai (facteurs anthropiques). Ces derniers en particulier, provoquent des perturbations du milieu naturel en stockant en surface d'importantes quantités de déchets solides qui sont à l’origine d'instabilités physiques et chimiques durables dans le temps. Celles ci peuvent à leur tour exercer des pressions sur les ressources naturelles, la biodiversité, provoquer la dégradation d'écosystèmes et avoir des impacts importants sur la santé.

 

1. Introduction

 

Les activités de l'industrie minière ont pendant des décennies constitué en Algérie, un des points d'appui du développement économique. Aujourd’hui, dans un contexte généralisé dans le monde de fermeture des mines encore en activité, on constate que les mines peuvent porter atteinte à l'environnement. Face à cette situation, les décideurs doivent, tant au niveau d'une surveillance que d'une éventuelle réhabilitation ou reconversion des anciens sites, prendre en compte les préoccupations du long terme liées en particulier à l'environnement pour répondre aux enjeux du développement durable.

 

Ce cours présente le contexte général d’un site minier et les éléments à considérer dans l’évaluation des impacts environnementaux potentiels lors de la réalisation d’un Plan de Prévention des Risques Miniers (PPRM). Il concerne exclusivement les risques de pollution induits par l’activité minière durant les phases de reconnaissance, de développement, d’extraction et de fermeture de site, ainsi que les travaux de traitements industriels du minerai réalisé sur le site minier.

 

2. Description des phénomènes induisant des pollutions chimiques

 

     2.1. LE CYCLE DE VIE D'UN SITE MINIER

 

La découverte de gîte (concentration métallique) économique nécessite généralement une intense exploration dans la première étape du déroulement d'une opération minière. Une fois les premiers indices découverts, les géologues déterminent la profitabilité du gisement à partir d'études sur sa taille et sa richesse. Si le gîte est économique, les travaux de développement et de construction des installations sont entrepris avant la réalisation de l'activité industrielle proprement dite d'extraction, et de concentration de minerais. La fermeture des installations (clôture et abandon) intervient à la fin du cycle de vie de l'opération.

 

Dans le passé et généralement avant les années 70, les aspects environnementaux d'une opération minière n’étaient pas pris en compte et la réglementation était peu exigeante. De nos jours, le respect de l’environnement fait partie du cycle minier qui comprend dès les premières étapes (fig. 1) des activités orientées sur la prévention (plan de fermeture) et la maîtrise des impacts résiduels (réhabilitation progressive) liés à l'existence des installations industrielles et des perturbations du milieu naturel.

 

Parmi ces impacts, la gestion des pollutions solubles et insolubles des eaux demeure un des enjeux majeurs des étapes qui succèdent à la clôture des opérations.

 

Les volumes concernés et la dimension du facteur temps attachés à un site minier contribuent à différencier les activités minières des autres activités industrielles.

 

Elles nécessitent la mise au point d'outils de prédiction, d'évaluation ou encore de monitoring qui doivent être appliqués pendant de nombreuses décennies. Des conditions géochimiques nouvelles en effet apparaissent généralement au cours du cycle de vie d'un site minier pour produire des impacts sur les eaux ou les sols pouvant présenter un risque sanitaire vis-à-vis des populations. Les modifications géochimiques apparaissent dans le temps lorsque l'environnement de matériaux change. C’est par exemple le cas lors de l’extraction de roches minéralisées et de leur passage d'un

 

milieu chimique réducteur profond à un environnement oxydant de surface, ou encore la transformation des conditions de pH d'un milieu (cas de l'acidification des cours d'eaux).

 

Fig 2 : Travaux et opérations d’une exploitation minière avec production des différents types de déchets.

 

2.2. ACTIVITÉS MINIÈRES GÉNÉRATRICES DE POLLUTIONS CHIMIQUES

 

Les activités minières constituent une filière industrielle dans laquelle peuvent se succéder différentes étapes. Comme le montre le schéma de la figure 2, les opérations mises en œuvre sur un site minier pour exploiter et valoriser un gisement peuvent être divisées en trois (ou parfois quatre) étapes principales :

 

- les travaux nécessaires pour donner accès au gisement, l'ampleur de ces travaux de

déblaiement (ou de découverture) dans le cas d'une mine à ciel ouvert et de percement de galeries,

puits ou descenderies pour une mine souterraine varieront énormément en fonction des caractéristiques du gisement. Les mines à ciel ouvert produisent en général beaucoup plus de stériles (en moyenne de l'ordre de 10 fois plus) que les mines souterraines davantage sélectives ;

 

- les travaux liés à l'extraction du minerai « tout venant » et à son tri préliminaire

(éventuellement nécessaire pour minimiser la quantité de roche stérile, ou « gangue », présente

dans le minerai « run of mine » ;

 

- un ensemble d'opérations de traitement, regroupé dans une usine d'enrichissement

(souvent appelée « la laverie »), utilisé pour séparer les phases minérales porteuses des éléments

valorisables de la gangue stérile ; le produit de l'usine, enrichi en élément valorisable s'appelle « le concentré ». Dans la plupart des cas, ce dernier constitue le produit marchand de la mine ;

 

- dans certains cas, une usine métallurgique (fonderie ou une usine de grillage) peut être

édifiée à proximité de un ou plusieurs sites miniers voisins pour séparer l'élément valorisable de son

minéral porteur et transformer le concentré en forme métallique.

 

           2.2.1. Les mines

 

Une mine (fig. 2) comprend tous les aménagements, ouvrages et équipements d'extraction, installations de traitement de minerai, haldes de stockage, prévisionnels et permanents, de matériaux et/ou de résidus, nécessaires pour l'exploitation et la valorisation d'un gisement.

 

Un gisement ne se définit pas en termes absolus, mais en termes relatifs à un marché économique. En effet, un gisement est une masse minérale, le minerai, ayant une concentration en un ou plusieurs éléments métalliques assez importante pour être exploitable avec profit dans un contexte économique donné.

 

La situation topographique, la géométrie et la morphologie du gisement détermineront la méthode minière utilisée pour son exploitation. Les deux grands types d'exploitation réalisés soit à ciel ouvert, soit en souterrain, provoquent des perturbations notables du milieu naturel.

 

a) Mines à ciel ouvert

 

L'exploitation d'un minerai à ciel ouvert est décidée en fonction du taux de découverture (ratio du volume de roche stérile qui doit être enlevé par volume de minerai), et n'est réalisable généralement que pour des minerais peu profonds (< 300 m). En général, après les travaux de décapage (enlèvement du sol et des horizons superficiels), les travaux de découverture concernent la partie stérile de la roche renfermant (ou encaissant) le minerai. Cette dernière est enlevée par gradins successifs dans une excavation souvent de forme conique dont les parois découpées en banquettes sont plus ou moins redressées suivant la tenue des roches. Plus l'excavation s'approfondit, plus le volume de stérile à extraire est important. Lorsque le taux de découverture devient trop important, une exploitation à ciel ouvert n'est plus rentable.

 

b) Mines souterraines

 

Dans le cas où une mine à ciel ouvert n'est pas possible, et si les teneurs du minerai le permettent, une exploitation en mine souterraine, méthode plus coûteuse, peut être mise en œuvre.

 

Dans ce cas, l'accès au minerai se fait par une ou plusieurs descenderies (cf. fig. 1). Si le gisement comporte une ou plusieurs couches de minerais horizontales dans une région à paysage plat, la desserte des galeries et la ventilation sont assurées au minimum par deux puits : l'un pour évacuer le minerai (skips) et l'autre pour le personnel, l'aération et l'exhaure des eaux. Dans le cas d'un gisement très redressé en zone de montagne, plusieurs galeries horizontales peuvent être tracées à partir du flanc de la colline – les travers bancs – pour rejoindre le minerai.

 

              2.2.2. Les usines de concentration de minerais

 

Une usine de concentration de minerai comprend les installations nécessaires à la mise en œuvre des procédés physiques et/ou chimiques destinés à conditionner, trier ou séparer les différentes substances minérales.

 

Les principales techniques de traitement utilisées sont les suivantes :

 

a) Procédés de tri physique

 

Basés sur les techniques utilisant la densité des particules ou leur susceptibilité magnétique, leur conductivité, etc., ces procédés se caractérisent d'une part par un broyage assez grossier du minerai (les tailles des particules vont de quelques millimètres jusqu’à 0,2 mm environ) et d’autre part par une absence de réactifs.

 

b) Procédés physico-chimiques de séparation

La flottation apparue au début du XXe siècle est la principale technique de séparation physico-chimique. Elle utilise une grande variété de réactifs chimiques, principalement pour modifier les états de surface (hydrophobie, hydrophylie) des particules. Elle nécessite également des particules suffisamment petites, de taille inférieure à 0,2 mm.

 

Les rejets de tels traitements sont donc constitués de produits fins renfermant des réactifs   

organiques et minéraux résiduels.

 

Les réactifs utilisés en flottation sont utilisés à des doses allant de quelques dizaines de grammes (tabl. 1) à quelques kilogrammes par tonne de minerai et se classent en :

 

Tabl. 1 - Principaux réactifs de flottation utilisés dans le traitement de minerai sulfuré avec leur consommation dans le cas de deux mines françaises de Pb-Zn

 

- moussants (tensioactifs organiques) ;

- collecteurs (tensioactifs organiques de type xanthates et dithiophosphate) ;

- agents modifiant le pH (acide sulfurique, chaux…) ;

- activants et dépresseurs (produits minéraux de type sels métalliques: Bichromate, CuSO4, Zn SO4, Fe² (SO4)3 etc., ou produits organiques de type cyanure de sodium ou amidon).

 

Ces réactifs de flottation se retrouvent, au moins en partie dans les résidus issus de ces traitements.

 

c) Procédés chimiques d'extraction/concentration

 

De tels procédés recouvrent à la fois les techniques de lixiviation (dissolution) et celles de récupération des éléments dissous (précipitation, cémentation...) et se caractérisent par une utilisation importante de réactifs chimiques (acides, bases, oxydants, complexants …).

 

Examinons les procédés chimiques qui ont principalement été employés pour l'uranium et pour l'or.

 

En ce qui concerne l’or, deux principaux procédés ont été mis en œuvre :

 

- la cyanuration repose sur une mise en solution de l'or et de l'argent, par complexation par du cyanure (KCN ou NaCN). La mise en solution de l’or et sa récupération se fait :

 · par arrosage avec la solution cyanurée de tas de minerais de quelques dizaines de milliers de

tonnes réalisés sur le site de la mine et déposés sur une surface synthétique imperméable ;

· récupération au bas du tas de la solution enrichie en or ;

· recyclage de la solution pendant n x 10 jours jusqu’à ce que la totalité de l’or récupérable soit passé en solution ;

· l’or en solution est ensuite récupéré de la solution enrichie par précipitation avec de la poudre de zinc, ou sur du charbon actif.

La mise en solution peut aussi se faire en agitant le mélange de minerais avec la solution cyanurée et du charbon actif dans des cuves de grand volume pendant un temps donné.

 

Le cyanure très toxique est utilisé à des teneurs de 0,02 à 0,08 % et se retrouve dans les résidus stockés sur le site de la mine (spent ore). En contact avec l'atmosphère, il se détruit par action photochimique, mais auparavant il est aussi dispersé par les eaux de ruissellement hors des tas de minerais traités.

 

- l'amalgamation consiste à réaliser par simple contact un alliage de mercure et d’or.

 

L’objectif est de collecter, et donc de concentrer, les plus fines particules d’or d’un minerai ou d’un concentré pour ensuite le récupérer par évaporation du mercure.

 

La présence de ce réactif dans les rejets solides constitue l'un des principaux dangers associés aux anciens résidus d'exploitation de l'or, ou encore aux sols des sites ayant accueilli les installations.

 

En ce qui concerne l’uranium

 

- la lixiviation du minerai brut se fait soit par arrosage de minerais en tas soit par contact dans des cuves agitées. Les solutions utilisées dépendent de la forme minéralogique de l’uranium et de la gangue. Ce sont des solutions acide en présence d’agent oxydant (Mn) ou alcaline (carbonate de soude) ;

- l'uranium mis en solution est ensuite soit fixé sur des résines échangeuses d’ions soit précipité pour former de l'uranate de magnésie, de diuranate d'ammonium ou d'uranate de soude (souvent désignés sous le nom de "yellowcake") ou une solution de nitrate d'uranyle.

 

                 2.2.3. Les usines métallurgiques

 

Dans une usine métallurgique, on met en œuvre des procédés de fusion (pyrométallurgie) ou de mise en solution (hydrométallurgie) pour produire un métal pur (produit marchand) :

 

- les procédés thermiques utilisés en pyrométallurgie consistent principalement en des grillages en milieu oxydant en présence de chlore, de minerais ou de concentrés de minéraux. Ces procédés engendrent non seulement des produits de grillage (scories), mais également des suies et nécessitent l'ajout de réactifs (fondants : fluorine, borax [Na2B4O5(OH)4.8H2O], cryolite

[Na3AlF6]...) ;

 

- les procédés hydrométallurgiques, qui tendent à remplacer les précédents notamment dans le domaine des métaux précieux et les métaux de base (zinc par exemple), permettent une véritable « distillation » des matières dissoutes, soit par précipitation sélective, soit par solvants, soit par échange d'ions. Souvent, pour certains minerais ou concentrés, il est nécessaire d'effectuer un grillage avant la mise en solution (lixiviation) de manière à produire un oxyde, un produit réduit ou un chlorure.

 

    2.3 PRINCIPALES SOURCES POTENTIELLES DE POLLUTION CHIMIQUE

 

           2.3.1. Les travaux et ouvrages d'exploitation (phot. 1)

 

Les vides souterrains et les excavations en surface créés pour accéder aux gisements constituent un premier type de source de pollution. En effet, le lessivage et l'érosion des parois de tels ouvrages par les eaux d'infiltration ou les eaux de ruissellement créent les conditions à l'origine de la contamination des eaux d'exhaure.

 

Phot. 1 - Mine à ciel ouvert de Laurieras (Haute-Vienne).

 

           2.3.2. Les eaux d'exhaure (phot. 2)

 

Les eaux d'exhaure sont produites lorsque le niveau piézométrique d'une nappe est plus haut que celui de travaux souterrains ou que le fond d'une mine à ciel ouvert.

 

Quand cela se produit, l'eau doit être pompée dans les ouvrages miniers ou aux alentours dans des puits, de manière à créer un cône de dépression et réduire les infiltrations. Lorsque la mine est opérationnelle, les eaux d'exhaure doivent être continuellement pompées pour permettre l'extraction du minerai. Cependant, une fois les opérations minières terminées, la gestion de ces eaux souvent s'interrompt et provoque des mises en charge hydrauliques dans les fractures et les ouvrages miniers (galeries, travers bancs, carrières). Ces eaux sont à l’origine des phénomènes d’oxydation et de dissolution des minéraux, mais elles sont surtout le vecteur des contaminants vers la surface et les eaux de nappes souterraines. Elles provoquent aussi le gonflement de certain minéraux (argiles) et leur changement de viscosité qui ont évidemment d’importantes conséquences sur la stabilité des terrains.

Phot. 2 - Eaux d'exhaure acides et ferrugineuses de l'ancienne mine d'or du Chatelet.

                       2.3.3. Les déchets miniers

 

a) Les différents types

 

Les déchets miniers peuvent être définis comme tout produit ou dépôt qui résulte de la recherche et de l'exploitation minière ou du traitement du minerai. Ces résidus peuvent être des produits naturels (stériles francs, produits minéralisés non exploitables) ou des produits artificiels, issus des phases de traitement et d'enrichissement du minerai (rejets de laverie) contenant d'éventuels additifs chimiques, minéraux ou organiques, ou générés lors d'une étape de fusion métallurgique (scories).

 

Près de 90 % des matériaux excavés d'une mine correspondent à des résidus solides généralement

disposés en surface. L'intégrité des ouvrages de stockage et le devenir des matériaux qu'ils contiennent constituent aujourd'hui un des enjeux majeurs des phases de fermeture et post-fermeture d'une mine.

 

Comme nous le verrons, la nature et l'importance des éventuels impacts qu'un déchet minier peut avoir sur l'environnement seront fonction de :

- sa quantité totale ;

- ses caractéristiques chimiques et minéralogiques ;

- ses caractéristiques physiques ;

- la méthode de stockage et sa localisation dans un contexte environnemental donné.

 

Ces différents aspects sont fortement influencés par les caractéristiques de la mine elle-même, et en particulier par :

- la substance exploitée ;

- la nature du gisement (types de minéralisation primaire et secondaire) ;

- sa taille et la méthode d'exploitation utilisée ;

- les caractéristiques des roches encaissantes ;

- les procédés de traitement du minerai employés et les réactifs utilisés ;

- sa localisation dans un contexte environnemental particulier (hydrogéologique, hydrologique, physiographique..).

 

Chacune des étapes d'exploitation présentée dans la figure 3 peut être génératrice de résidus miniers, généralement de caractéristiques physiques et chimiques, donc d'impact environnemental potentiel, très différentes. Leurs volumes respectifs, surtout en ce qui concerne les résidus de découverture, seront fonction aussi du type d'exploitation (mine à ciel ouvert, mine souterraine) et leur composition chimique variera en fonction de la substance exploitée et la nature du gisement.

 

Nous pouvons classer les principaux types de résidus miniers en quatre grands groupes (fig. 3) (photos 3, 4, 5 et 6) :

 

- les stériles francs de découverture et/ou de traçage de galerie ;

- les résidus d'exploitation (stériles francs et/ou stériles de sélectivité minéralisés) ;

- les résidus de traitement (rejets de l'usine de concentration) ;

- les autres résidus (scories de grillage ou de fusion du minerai).

 

b) Les stériles francs de découverture

 

Ce sont les sols et morts terrains qui recouvrent le minerai, décapés pour une mise en exploitation à ciel ouvert, ou les matériaux stériles extraits lors du percement de galeries, puits ou descenderies (fig. 1-A, B) dans le cas d'une mine souterraine.

 

Ces résidus contiennent, en règle générale, des teneurs en métaux et en éléments accompagnateurs faibles, de l'ordre de grandeur de l'anomalie géochimique produite par les phénomènes de dispersion naturelle, remaniement mécanique ou diffusion chimique des métaux du minerai dans sa roche encaissante. D'une certaine façon, les caractéristiques physiques et chimiques de ce genre de résidus ne se différencieront pas de celles des matériaux qui auront été remaniés lors de la construction de tout autre ouvrage d'art (autoroute, tunnel, barrage, etc.) dans le même contexte régional.

 

Fig. 3 - Les étapes d'exploitation d'un gisement métallique et les résidus miniers correspondants

 

Phot. 3 - Résidus d’exploitation stériles des niveaux supérieurs de la mine de

Tungstène de Salau (Ariège).

Phot. 4 - Résidus de traitement (cyanuration en cuve après amalgamation) de

l'ancienne mine d'or de Cheni (Haute-Vienne).

 

Phot. 5 - Résidus de traitement (tailings) (flottation) da l'ancienne mine de W de Salau (Ariège).

Phot. 6 - Résidus de lavage (Schlamms) d'une ancienne mine de charbon

(Bertholène).

 

c) Les résidus d'exploitation (stériles de sélectivité)

 

Lors de l'exploitation, le mineur opérera un tri précoce entre le minerai vendable et le minerai pauvre où la récupération des substances valorisables sera non économique dans un tel contexte.

 

Ce minerai pauvre pourra être stocké sur place, dans l'attente d'un traitement éventuel si les cours du métal venaient à monter. Dans les mines anciennes, la pratique était parfois de le mettre à part ou de le rejeter de la même façon que les autres résidus de la mine (fig. 1-C, E). Dans le cas de mines modernes de métaux de base, les stocks de ce type de résidus sont souvent traités en fin d'exploitation.

 

Le caractère plus ou moins disséminé d'un gisement conditionnera également la technique d'exploitation, donc le volume, la nature et l'importance des résidus d'exploitation. Dans un gisement de fer de type « disséminé » par exemple, l'exploitant placera la teneur limite d'exploitation du minerai à une valeur donnée (par exemple 28 % en fer). Cette limite est opérationnelle seulement quand la masse minérale exploitée présentera une gamme continue de teneurs décroissantes en fer suivant les conditions géologiques responsables de sa formation. Le résidu minier dans ce cas aura, en effet, des teneurs en métal très voisines du minerai. Par contre, pour les gisements de type « tout ou rien », il y a discontinuité géochimique brutale entre le minerai et sa gangue, celle-ci ne contenant plus que de faibles anomalies en métaux (approchant à peine le centième de la teneur du minerai). Dans ce cas, une exploitation du minerai ne laissera que des rejets pauvres, plus ou moins contaminés par des métaux et métalloïdes accompagnateurs du gisement.

 

d) Les résidus de traitement ("tailings")

 

La valorisation du minerai vendable consiste à effectuer plusieurs opérations de préconcentration

du ou des minéraux économiques. Ces opérations produisent plusieurs types de solides : l'un enrichi

en substances valorisables (le « concentré ») et un ou plusieurs qui en sont appauvris. Dans le cas des métaux de base et de l'or, les résidus sont généralement constitués de particules finement broyées, de sables fins et limons issus du traitement du minerai par gravité ou flottation. Ils sont souvent resédimentés dans des bassins de décantation retenus par des digues à résidus ("tailing dams") (fig. 1-F,G) ou déposés en terril. Afin de réduire les coûts de transport, l'exploitant localisera la laverie en aval de la mine (transport par gravité) et les rejets seront décantés dans le vallon sous-jacent, à l'amont d'une digue à résidus.

 

Les résidus et les boues issus d'une laverie conventionnelle correspondent à un

matériau contenant entre 40 et 70 % de liquide et de 30 à 60 % de solide. Ils contiennent fréquemment des teneurs significatives en éléments accompagnateurs ou en minéraux secondaires tels que les sulfures de fer, d'arsenic (respectivement pyrite [FeS2], mispickel [FeAsS], etc.) et leurs produits d'oxydation (sulfates, oxyhydroxydes...). Ils peuvent contenir également des concentrations résiduelles non négligeables en réactifs (ex : phosocrésols, xanthates, cyanures, mercure...) utilisés pour la séparation et la concentration en métaux valorisables.

 

Les résidus de lixiviation ("spent ore") sont formés, parfois sur une surface de plusieurs hectares, par des tas de minerais broyés ou concassés dont on a extrait les métaux par lixiviation ("heap leaching" par cyanuration pour les métaux précieux, "dump leaching" par utilisation d'acide pour le cuivre et l'uranium).

 

e) Autres types de résidus

 

Dans bon nombre d'exploitations anciennes polymétalliques (fer, cuivre, étain, plomb/zinc, or…), le minerai ou concentré était grillé ou fondu sur place pour éliminer certains composants (sulfures, par exemple) afin d'arriver à un produit marchand de qualité (fig. 1). Dans ces cas, on peut retrouver sur ces sites anciens des tas de scories qui forment un cas particulier de rejets. Des suies provenant du nettoyage des fours de grillage ou des conduits d'évacuation des fumées y sont fréquemment associées. Ces produits oxydés se retrouvent soit accumulés à proximité de la mine si le grillage était opéré sur place, soit souvent entassés à proximité de la fonderie.

 

              2.3.4. Les stockages d'hydrocarbures et de produits chimiques

 

Sur les sites miniers, différents types d'hydrocarbures sont utilisés comme carburant (fuel, gasoil, essence…) et comme lubrifiants ou produits de maintenance des engins et moteurs (huiles minérales, huiles de vidange, graisses, solvants, etc.). Ces produits sont généralement stockés dans des cuves aériennes et/ou souterraines ou conditionnés en fûts près des installations de maintenance.

 

Une grande variété de produits chimiques sont utilisés à différentes étapes de la production de minerais. Des explosifs sont tout d'abord utilisés lors de l'abattage et de la phase d'extraction. Ensuite, de nombreux réactifs peuvent rentrer dans les procédés de traitement que ce soit sous forme de réactifs de flottation (voir paragraphe 1.1.2 et tableau 1) ou réactifs entrant le processus de lixiviation et de précipitation des éléments dissous (cyanure de sodium, acides, bases, sels de métaux etc.). Enfin, un certain nombre de produits sont utilisés lors de l'étape d'affinage et de purification (par exemple : utilisation de fondants lors de la fusion de métaux).

 

    2.4. CARACTÉRISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES DES SOURCES DE POLLUTION

 

               2.4.1. Les éléments potentiellement toxiques

 

a) Principaux contaminants

 

Les principaux contaminants mis en jeu sont des substances chimiques inorganiques (métaux

lourds, nitrates, sulfates…) ou organiques (hydrocarbures, composées phénoliques, Phtalates et autres produits organiques industriels...), à l'exclusion de tout contaminant biologique.

 

b) Paramètres physicochimiques contrôlant le comportement des éléments potentiellement toxiques

 

La concentration en tel ou tel élément contaminant dans les eaux d'exhaure, les résidus miniers ou les sols, ne constitue qu'une première information sur le vrai risque posé pour l'environnement (fig. 4). Il est nécessaire, en plus, d'acquérir des informations sur trois paramètres physicochimiques déterminant le comportement de ces éléments dans l'environnement :

 

- la réactivité controlée par vitesse de dissolution des phases minérales porteuses, la précipitation

d'éventuelles phases secondaires, la granulométrie, la porosité des roches favorisant l'accès aux

agents d'altération, etc. ;

- la mobilité chimique vers les compartiments eaux et sols, controlée par la spéciation des éléments (AsIII/As IV, Cr VI/Cr III…), les phénomènes de sorbtion, de coprécipitation, de conditions Eh et pH, et d'une manière générale les déplacements des éléments à l'état dissout dans un fluide ;

- la dispersion physique ou l'aptitude d'un élément à se déplacer par des voies non chimiques comme par exemple le mouvement des particules en suspension dans les eaux superficielles, la sédimentation dans le lit des cours d'eaux ou encore le transport par voie aérienne (érosion éolienne ou émissions atmosphériques des usines métallurgiques par exemple).

 

Chacun de ces paramètres peut être mesuré en fonction des sites et des situations de manière à obtenir le maximum d'information sur la nature et le devenir des sources de pollution. Par exemple des tests de lixiviation effectués selon la norme X 31 210 peuvent être entrepris sur des rejets solides dans le but d'appréhender la nature et la quantité d'éléments mobilisables et disponibles dans l'environnement.

 

La figure 3 ci-après empruntée à K.S. Smith et I.O. Huyck (1999) illustre les interactions complexes entre les différents paramètres physico-chimiques et leurs rôles dans le transfert et le devenir d'un élément chimique (un élément métallique par exemple) depuis sa libération d'une roche ou d'un déchet (source) jusqu'à sa mise à disposition pour les organismes végétaux ou animaux (biodisponibilité) avec un éventuel effet néfaste sur ces organismes (toxicité).

 

Fig. 3 - Diagramme simplifié montrant les transferts et les relations entre métal contenu dans une roche et la toxicité (d'après Kathleen S. Smith et al., 1999, modifié).

 

c) Le Drainage Minier Acide (DMA) (phot. 7)

 

Les mines contenant des sulfures (mines polymétalliques et certaines mines de charbon) ainsi que les déchets miniers générés présentent une grande instabilité chimique des espèces minéralogiques contenues. Une fois exposés à l'air libre et à l'eau, la plupart des minéraux sulfurés subissent une bio-oxydation génératrice d'acide sulfurique et de fer ferrique s'accompagnant d'une solubilisation des éléments métalliques (Zn, Pb, Cu, Fe, As, Cd, etc.). Ces réactions donnent ensuite lieu à des

réactions d'oxydation, de dissolution, de précipitation et de recristallisation successives qui produisent de nombreux composés minéraux secondaires (oxyhydroxydes, oxyhydroxysulfates complexes, etc.). Ce phénomène évolutif, plus connu sous le nom de Drainage Minier Acide (DMA), est à l'origine de charges polluantes acides et/ou métalliques dans les eaux d'exhaure ou les eaux de ruissellement et constitue un des problèmes environnementaux majeurs de l'industrie extractive mondiale.

L'une des caractéristiques essentielles du Drainage Minier Acide est la durée. Les écoulements acides se manifestent pendant quelques années ou pendant quelques siècles, généralement jusqu'à épuisement de la source de sulfure. Ils apparaissent dès le début de l'exploitation et jusqu'à plusieurs années après la fermeture du site minier.

 

Phot. 7 - Exemple de drainage acide (eaux à pH de 3 riches en ions ferriques),

eaux d'exhaure de l'ancienne mine de W d'Enguialès (Aveyron).

 

                2.4.2. Cas particulier des résidus miniers

 

La gestion des résidus miniers (stériles et résidus fins de traitement) constitue un des problèmes environnementaux majeurs auquel doit faire face les exploitants miniers durant l'activité de la mine et surtout après la fermeture des opérations. Près de 90 % des matériaux excavés d'une mine correspondent en effet à des déchets qui dans le cas d'une mine à ciel ouvert sont généralement abandonnés en surface.

La grande diversité des déchets miniers produits est, comme nous l'avons vu, fonction des substances exploitées, des types de minéralisation et des modes de traitements qui souvent, sur un même site, ont évolué en fonction du temps. Cette variabilité pose le problème de la représentativité des caractéristiques physicochimiques des déchets rencontrés, leurs compositions minéralogiques et chimiques devenant spécifiques des sites où ils ont été produits.

 

a) Les éventuels contaminants présents dans les résidus miniers

 

Les déchets miniers peuvent renfermer d'éventuels contaminants chimiques provenant

de deux origines principales :

- les minéraux comprenant le minerai et sa gangue ;

- les réactifs utilisés dans les différentes filières de traitement.

 

Les déchets potentiellement susceptibles de poser des risques compte tenu de leur composition chimique sont donc :

- les stériles de sélectivité (minerai pauvre) ;

- les résidus de l'usine de traitement (résidus de laverie).

 

Les stériles de sélectivité « minéralisés »

En ce qui concerne les stériles minéralisés, le risque chimique éventuel sera déterminé surtout par la teneur en :

- sulfures de fer (pyrite [FeS2], pyrrhotite [FeS], marcassite [FeS2]) et autres sulfures de métaux, phases minérales à l'origine du DMA (voir ci-dessus) ;

- phases minérales comprenant des éléments traces plus ou moins toxiques (arsenic, métaux lourds...).

De ce fait, nous pouvons focaliser notre attention dans la plupart des cas sur les résidus des mines

métalliques, et certains minéraux industriels (fluorine [CaF2], barytine [BaSO4], pyrite, andalousite

[Al2SiO5]...).

 

Tabl. 2 - Principales espèces minérales des minerais français et spectre des éléments traces associés

 

Comme le montre le tableau 2, si la composition minéralogique des principaux minerais extraits en France est relativement simple, le spectre d'éléments traces qu'ils renferment est plus large. Parmi les métaux et non métaux cités dans les normes et/ou directives européennes concernant l'évaluation de la qualité des eaux et des sols pour différents usages, 11 sont fréquents dans les gisements français : As, Cd, Co, Cr, Cu, Hg, Mo, Ni, Pb, Se, Zn, soit comme constituants principaux de minerais, soit comme accompagnateurs dans la gangue.

 

Les résidus de l'usine de traitement

La composition chimique des rejets issus du ou des traitements du minerai dépendent du minerai (éléments chimiques majeurs ou mineurs, minéraux présents dans le minerai de départ et se retrouvant dans les résidus…), mais également du procédé utilisé lors du traitement.

 

Pendant l'époque préindustrielle, les procédés de concentration de minerai ont peu évolué et les rejets, bien que souvent riches en métaux ou fortement pollués (cas du mercure dans les anciennes exploitations d'or où le minerai était traité par amalgamation), ont eu un impact relativement limité sur l'environnement, car les volumes en jeu étaient très réduits et les minerais traités souvent déjà oxydés. Par contre, l'utilisation à partir des années 1920 de procédés industriels combinant

l'utilisation de réactifs chimiques et des broyages fins, comme par exemple la flottation des sulfures, a augmenté considérablement les risques sur l'environnement.

 

    2.5. LES IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

 

            2.5.1. La notion « relative » d'impact environnemental

 

Il importe d'attribuer aux différents impacts miniers une hiérarchie qui soit représentative de leur réelle importance, par comparaison :

- aux impacts des autres activités industrielles ;

- au point zéro naturel ;

- à la durée de ces impacts et à leur évolution dans le temps, voire à leur prise en compte dans les

différentes phases de la vie de la mine par des mesures spécifiques préventives, curatives ou de confinement.

 

On doit ainsi distinguer le cas échéant l'impact non nuisible (ou marquage), l'impact nuisible de

nature chimique (ou pollution), et l'impact nuisible de nature physique (ou nuisance).

 

La notion d'impact environnemental ne prend tout son sens que si elle inclut un changement des

paramètres environnementaux, suite à une activité minière. Ces paramètres, qui régissent la «

qualité de l'environnement », peuvent avoir plusieurs composantes :

- la composition chimique des eaux, des sols, des sédiments, etc ;

- la diversité biologique ;

- les qualités esthétiques visuelles ; etc.

 

Pour être en mesure de juger le degré d'impact, il faut donc :

- que chaque composant soit exprimé en termes d'un paramètre quantifiable (pH, concentration d'un élément métallique, quantité de matières en suspension, mesure de diversité biologique…) ;

- que la valeur mesurée puisse être comparée à la gamme de valeurs « naturelles » du paramètre pour l'environnement du site minier, c'est-à-dire à ceux qui auraient existé avant les travaux miniers (« premining conditions »).

 

En effet, toute enquête visant à déterminer l'impact réel d'une exploitation minière (pollution anthropique) aura besoin au préalable d'une connaissance aussi précise que possible de l'environnement naturel du site avant l'exploitation. Cela est particulièrement important dans le cas d'un impact environnemental dû à une éventuelle contamination par les éléments présents dans le minerai et/ou son encaissant car, comme évoqué précédemment, le site peut être situé dans un contexte d'anomalie naturelle exprimée en termes de concentrations « anormalement élevées » d'éléments divers dans les roches, les sols et les sédiments et/ou dans les eaux de surface et souterraines. Dans ce cas particulier, nous avons besoin de prendre en compte le « fond géochimique » de l'environnement du site.

 

             2.5.2. Les différents types d'impacts environnementaux

 

Les impacts environnementaux d'origine minière ayant des conséquences néfastes sur le court terme sont bien connus, mais la longévité du cycle de vie d'une exploitation, les volumes considérables de déchets produits sans aucune comparaison avec d'autres industries et la durée des réactions géochimiques mises en jeu expliquent l'importance des impacts sur le long terme.

 

La nature et la gravité des éventuels impacts environnementaux du type « contamination chimique » avec « effets toxicologiques ou éco-toxicologiques » varieront selon qu'un rejet solide ou liquide contiendra ou non des composants chimiques capables :

- de changer de façon significative et adverse la composition chimique des ressources en eaux (de surface, souterraines) et/ou les sols et sédiments ;

- et/ou d'avoir des effets négatifs sur la flore, la faune et la chaîne alimentaire affectant la santé humaine.

 

Dans le cas d'une mine contenant des composés chimiques potentiellement polluant dans les dépôts de résidus solides et/ou dans les eaux d'exhaure, les perturbations du milieu naturel seront multiples et pourront affecter à des degrés divers, les différents compartiments de l'environnement.

 

a) Vers les compartiments de l'écosystème aquatique (phot. 8)

 

Phot. 8 - Tailings transportés et re-sédimentés sur les berges d'une rivière (Enguialès - Aveyron).

Les principaux impacts sont les suivants :

 

- une contamination chimique des eaux de surface et/ou souterraines par les substances

dissoutes ou les matières particulaires. Le « DMA » (cf. § 2.4.1.), par exemple, pourra être

responsable de l'acidification d'un cours d'eau et des teneurs élevées en fer, sulfates et,

éventuellement en métaux dissous ;

- suite à l'érosion des haldes et des dépôts de résidus par les eaux de ruissellement :

· une source de matières en suspension (sédiments) entraînant une forte turbidité et une dégradation de la qualité des eaux et de la nature des fonds des cours d'eau en aval du site. Cela peut avoir d'éventuels impacts sur le régime des rivières à l'aval (sédimentation excessive), sur la flore et la faune naturelles et, donc, sur l'utilisation éventuelle de ces cours d'eau pour la pêche, la pisciculture, la baignade, etc. ;

· l'origine de rejets importants de matières solides contaminées dans le réseau de

drainage, les sols des versants ou les alluvions. Ces résidus peuvent renfermer à la fois des quantités non négligeables en éléments accompagnateurs présents dans le minerai (métaux lourds, As, etc.) et éventuellement, des quantités résiduelles significatives en réactifs chimiques ajoutés dans les filières de traitement ;

- suite à l'exploitation et au pompage (fig. 4), une modification durable des formations aquifères et des caractéristiques hydrodynamiques (perméabilité, débit, transmissivité, piézométrie, vitesse, gradient hydraulique...) des nappes souterraines. Le pompage de ces eaux peut entraîner de sérieuses perturbations sur le comportement des nappes (disparition des nappes superficielles) et sur le régime hydrique du réseau de drainage en surface (assèchement de zones

humides, tarissement de sources, rejets d'exhaure). La remontée des eaux dans les vieux travaux après exploitation peut s'accompagner de recharges des nappes concernées et provoquer d'éventuelles inondations. La gestion des eaux après fermeture des mines est donc aujourd'hui au cœur des préoccupations de l'administration et des collectivités locales.

 

b) Vers les compartiments sol et sous-sol

 

Les impacts correspondent à des séquelles d'origine chimique et physique et notamment :

- une contamination chimique induite par les retombées de poussières ou par les épandages de résidus pollués, de sédiments d’inondation, de produits chimiques ou d'effluents ;

- des phénomènes de subsidence ou d'affaissement liés aux cavités souterraines dans le cas d'exploitations non remblayées ou foudroyées ainsi qu'aux remontées des nappes.

 

c) Vers le compartiment air

 

L'impact est principalement matérialisé :

- par la dispersion éolienne de poussières volantes, donc de pollution pour les habitants et utilisateurs des espaces sujets aux éventuelles retombées aériennes ; les résidus de laverie peuvent être particulièrement sujets à ce type de transport hors site dû à la finesse des particules de ce genre

de résidu ;

- par des émissions de gaz dangereux (grisou, radon), par une importante baisse des taux d’O2 et l’accroissement concomitant des teneurs en CO2.

 

d) Vers le paysage (phot. 9)

 

Des modifications de topographie et des qualités « esthétiques » de l'environnement constituent les principaux impacts. Cela peut être le cas, par exemple, pour les vides laissés par les exploitations à ciel ouvert ou pour tous les résidus à volume important (stériles de découverture, d'exploitation, de laverie) dont les lieux de stockage n'ont pas été réaménagés (terrassement, revégétation, etc.).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fig. 4 - Modifications majeures des formations aquifères en rapport avec l’exploitation des mines.

 

 

Phot. 9 - Impact sur le paysage de déchets miniers rejetés à même la pente topographique (Enguialès).

                2.5.3. Les facteurs déterminants influençant les impacts environnementaux

 

La plupart des impacts qu'une mine peut avoir sur l'environnement résultent de la combinaison complexe et de l'interaction entre plusieurs facteurs de nature géologique et industriels.

 

a) Facteurs géologiques

 

Ces facteurs sont les plus nombreux puisqu'ils influencent la taille et la nature des conséquences d'une exploitation minière sur son environnement ou de son « comportement environnemental ».

 

Taille et mode de gisement

 

L'échelle des effets provoqués sur l'environnement généralement augmente avec la taille des gisements. Ceux-ci se présentent sous une grande variété de formes correspondant à des filons, stockworks, brèches, dissémination ou amas et lentilles de minéralisations massives.

 

Chaque type influence de façon différente l'accès et l'extension des agents d'altération (eaux météoriques et eaux souterraines) aux roches minéralisées qu'elles soient en place, en profondeur ou mises en dépôt en surface.

 

Les filons par exemple correspondent à des remplissages plus ou moins complets de fractures préexistentes qui peuvent en fonction de l'espace demeuré libre, favoriser ou au contraire inhiber les circulations d'eaux souterraines.

 

Les stockwerk et les brèches minéralisées sont formés par un réseau anastomosé de fissures, filons et filonets qui peut affecter de grands volumes de roches et donc correspondre à d'importants aquifères si leur perméabilité est élevée.

 

Les minéralisations disséminées sont composées de minéraux dispersés dans la roche encaissante induisant de grands volumes de roches en interaction avec les eaux souterraines.

 

Les minéralisations massives, sont comme leur nom l'indique, en général constituées par des sulfures massifs contenus dans peu de gangue. Les eaux circulant à la faveur des fractures et fissures recoupant ces masses minéralisées peuvent devenir fortement acides et transporter des éléments

chimiques indésirables ayant des concentrations très élevées.

 

Lithologie des roches encaissantes

 

Le type et la composition des roches encaissantes des minéralisations ont une influence directe sur

certains facteurs tels que la composition des eaux de drainage et des exhaures, ainsi que sur leur signature en éléments traces.

 

Ainsi par exemple, les eaux drainant des roches carbonatées (calcaires, dolomies, marbres, schistes et grès carbonatés) ou des roches contenant des minéraux aluminosilicatés réactifs (tufs volcaniques ou roches ultrabasiques) présentent une alcalinité modérée à élevée contribuant à la neutralisation d'eaux acides et à l'adsorption de métaux sur des particules.

 

Les caractéristiques physiques les plus importantes des roches sur le plan environnemental sont de deux types :

- la conductivité hydraulique, fonction de la porosité et de la perméabilité des roches (perméabilité liée à l'existence de pores ou de fissures), va contrôler la circulation des eaux souterraines et l'accès de celles-ci aux zones minéralisées ;

- l'aptitude au mouvement qu'il soit lent et continu (érosion, fluage...) ou rapide et discontinu (écroulement, glissement de terrain...) est fonction de la structure et de la texture de la roche (existence de structures planaires telles que schistosité, stratification, surface d'écoulement...), ainsi que de son contenu en argile (plus le contenu en argile est important, plus la propension au mouvement est élevée).

 

Cette caractéristique des roches encaissantes lorsqu'elles sont ramenées en surface, peut avoir des conséquences importantes sur la stabilité des ouvrages de stockage et en particulier sur les conditions de dépôt des résidus.

 

Type d'altération hydrothermale

 

L'altération hydrothermale est une caractéristique commune à beaucoup de gisements, et résulte d'interactions géochimiques entre les fluides hydrothermaux qui génèrent le gisement et l'altération des roches encaissantes. Elle comprend des assemblages minéralogiques caractéristiques des types de gisement (ex. : silicification d'épontes filoniennes, argilisation des porphyres cuprifères, développement de quartz-muscovite dans les gisements d'étain/tungstène, etc.). Elle a des conséquences importantes sur l'environnement puisqu'elle affecte à la fois les propriétés chimiques et physiques des roches encaissantes et donc leur comportement.

 

Nature du minerai : minéralogie primaire et gangue

 

Le minerai renferme des minéraux économiquement valorisables étroitement associés à des minéraux de la gangue souvent non économiques qui jouent un rôle clé dans la dispersion et la mobilité des éléments chimiques dans l'environnement :

- les minéraux générateurs d'acide correspondent aux sulfures et aux sulfosels qui deviennent instables en présence d'oxygène atmosphérique ou une fois exposés à la circulation d'eaux souterraines oxygénées. L'oxydation bactérienne catalysant les réactions constitue une des cause de l'auto-entretien et de la propagation du drainage minier acide (voir paragraphe DMA). La quantité d'acide produit est cependant fonction des types et de la quantité de sulfures présents dans le minerai, de leur résistance à l'altération, de leur contenu en fer et donc de la présence d'ion ferrique comme oxydant, ainsi que des espèces minérales secondaires induites par les phénomènes complexes de dissolution, précipitation et recristallisation ;

- les minéraux consommateurs d'acide correspondent à une grande variété de carbonates et

d'aluminosilicates développés dans le minerai pour former la gangue. Ils réagissent avec les minéraux précédents en consommant de l'acide durant l'oxydation des sulfures. Les carbonates alcalins comme la calcite, la cérusite, ou la strontianite, se dissolvent rapidement au contact de l'acide alors que les aluminosilicates comme les feldspaths ou les argiles ne réagiront pas avec les

eaux acides ;

- les minéraux porteurs d’éléments traces ;

- les minéraux sont constitués par des éléments chimiques majeurs tels que le soufre et le zinc par exemple pour la blende mais ils contiennent aussi des « éléments traces » dans leur réseau cristallin.

 

Bien qu’à des niveaux de concentrations très inférieurs ces derniers, tels que le mercure ou le

cadmium pour la blende prise en exemple, sont libérés dans l’environnement lors de la destruction

des minéraux et peuvent y jouer un rôle majeur au plan pollution. Si dans le cas de la blende, le Zn

mis en circulation dans les eaux et les sols n’est a priori pas dangereux, il en est par contre tout autrement pour Hg et Cd… ;

- à titre indicatif, nous citerons d'autres minéraux comme ceux possédant une structure fibreuse par exemple, (famille des amiantes : crocidolite, amosite ou celle des serpentines : chrysotile) qui peuvent induire, en cas d'inhalation, de graves problèmes sur la santé humaine.

 

Minéralogie secondaire (phot. 10)

 

- Sels solubles

 

On observe la formation d'une grande variété de minéraux solubles (sulfates, oxyhydroxysulfates…) résultant du phénomène d'oxydation des sulfures en contexte superficiel. Ces sels solubles sont à l'origine de problèmes de pollution des eaux et des sols car ils forment avec leur phase solide des réserves temporaires d'acide et de métaux. Durant les périodes humides (pluies ou neige), leur dissolution entraîne un relargage des substances potentiellement toxiques vers les différents milieux de l'environnement.

 

Phot. 10 - Exemple de minéralogie secondaire (sulfates de fer : mélantérite et sulfates de zinc) dans tailings de l'ancienne mine de Pb/Zn de Pierrefitte (Hautes-Pyrénées).

 

L'ensemble des réactions impliquées dans le phénomène de production de DMA et produisant de nombreux composés minéraux, est rappelé dans la figure 5 ci-dessous.

 

Fig. 5 - Schéma récapitulatif des réactions primaires et secondaires se déroulant au cours d'un phénomène de Drainage Minier Acide (d'après Nordstrom, 1982).

 

Les sels solubles secondaires se forment par évaporation des eaux acides. Par exemple, des

efflorescences ou des encroûtements sont fréquents à la surface des dépôts de tailings, sur les parois des anciens travaux miniers ainsi que sur les berges des ruisseaux ou rivières pollués.

 

- Précipitation de fer

 

L'oxydation du fer dans les eaux chargées en cet élément induit une précipitation d'hydroxydes ferriques rougeâtres et d'hydroxysulfates de couleur ocre. Dans le cas d'une sursaturation et d'une précipitation rapide, des particules en suspensions se forment et sédimentent dans le lit des cours d'eau. A l'inverse, lorsque la sursaturation en fer est minimale (cas d'eaux acides circulant par intermittence sur un sol par exemple), des précipités d'hydroxydes ferriques se déposent sur les

surfaces préexistantes pour former des ferricrêtes, croûtes ou indurations ferrugineuses

particulièrement résistantes à l'érosion. Ces matériaux supergènes peuvent piéger temporairement des éléments traces métalliques ou des éléments toxiques comme par exemple l'arsenic et les libérer à la faveur de modifications des conditions de pH et Eh (A. Courtin-Nomade, 2003).

 

- Étendue de la zone d'oxydation

La zone d'oxydation correspond à la partie superficielle non saturée du gisement soumis aux altérations météoriques. Dans cet horizon, les éléments constitutifs du minerai et d'une partie des roches encaissantes sont soit mobilisés en solution soit incorporés dans une grande variété de minéraux oxydés (oxydes et hydroxydes de fer, manganèse, aluminium, calcium, etc.) qui tendent à devenir relativement insolubles dans les conditions des eaux surface (eaux d'infiltration). L'extension de cette zone oxydée est fonction de la géologie, de la topographie et du climat, et peut réduire de façon significative le potentiel de production de drainage acide d'un gisement contenant des sulfures.

 

- Topographie et physiographie

 

La topographie et la physiographie d'un site sont déterminantes sur l'action des systèmes hydrologiques et le fonctionnement des bassins hydrologiques et hydrogéologiques (aquifère avec sa nappe d'eau souterraine).

 

Dans le domaine des eaux souterraines, elles déterminent en particulier la position et la forme des

nappes souterraines et par conséquent les paramètres hydrauliques (vitesse et direction de l'écoulement, variation de niveaux…) auxquels sont soumises les exploitations minières.

Si le sous-sol est imperméable, le chemin de l'eau ne sera déterminé que par la topographie. Le bassin versant d'un cours d'eau et de ses affluents (ou bassin hydrographique) sera alors limité par des lignes de crêtes et des lignes de plus grande pente.

 

- Hydrogéologie et hydrologie

 

Ces facteurs sont étroitement contrôlés par les caractéristiques géologiques des gisements et la nature des roches encaissantes. La lithologie, l'épaisseur des formations géologiques et leur perméabilité vont en effet déterminer la vitesse de l'infiltration et de la circulation des eaux ainsi que celle du transfert des polluants vers le milieu souterrain.

 

L'existence de formations karstiques carbonatées ou de milieux fortement fissurés (cas des skarns et des gisements filoniens par exemple) induit des types de nappe à fort débit avec des vitesses de transfert élevées. L'écoulement vers un cours d'eau se fera alors préférentiellement par les eaux souterraines. À l'opposé, des formations peu perméables de type argileux (cas des altérations argileuses associées aux minéralisations de type disséminé par exemple) constituent des barrières plus ou moins imperméables qui compartimentent le bassin hydrogéologique et retardent le

transfert des pollutions. Dans ce cas, c'est le ruissellement qui alimentera de façon préférentielle le réseau de drainage.

 

Dans tous les cas, le bassin versant (« watershed »), contrôlé par la topographie et la géologie, va correspondre à l'échelle pertinente des phénomènes qui se déroulent au niveau d'un permis minier ou d'un district regroupant plusieurs mines. Il va en particulier faciliter la compréhension des processus liés aux sources de pollution, à leur transfert et à leur transformation ainsi qu'aux effets potentiels induits sur les écosystèmes et les populations (périmètre des risques).

 

b) Facteurs industriels

 

Les techniques industrielles utilisées pour extraire et traiter les minerais sont très nombreuses et influencent de façon significative la nature, les volumes et la composition des rejets solides et liquides et des émissions atmosphériques.

 

Ces techniques, cependant, dépendent étroitement des caractéristiques géologiques et minéralogiques du minerai et peuvent changer durant la vie de l'exploitation en fonction de l'évolution des technologies.

 

Techniques minières

 

Les conséquences des techniques minières (à ciel ouvert ou en souterrain) sur l'environnement sont

liées à l'importance des perturbations physiques générées et au volume et à la nature des roches exposées à l'altération météorique. Ainsi une exploitation par puits et galeries d'un gisement filonien va générer un impact moindre (en termes de perturbation en surface comme en termes de production de déchets solides) qu'une exploitation à ciel ouvert d'un gisement à minerai disséminé ou massif.

 

Techniques de concentration des minerais

 

Les techniques de concentration de minerais ont fortement évolué ces dernières décennies pour permettre de traiter de plus grands volumes de minerais avec des teneurs plus basses. Deux facteurs importants vont influencer les impacts potentiels sur l'environnement. Il s'agit de la nature des produits chimiques utilisés (voir paragraphe 2.2.2) et la taille des particules générées dans les procédés (tailings et résidus de flottation par exemple). Cette dernière caractéristique correspond

à la surface spécifique des matériaux potentiellement polluants. Plus la taille des particules produites est faible, plus grandes sont la surface spécifique et la réactivité chimique des matériaux avec les agents d'altération. La finesse et l'homogénéité de la taille des particules des résidus de l'usine de traitement les rendent donc particulièrement susceptibles à une dispersion par l'eau et le vent dans l'environnement (dans le cas d'un lieu de stockage mal conçu et non réaménagé). Les

capacités de production d'acide, de matières en suspension, de polluants dissous, voire de poussières, sont ainsi maximales dans le cas de minerais sulfurés fins ou de tailings sulfurés.

 

2.6. TYPOLOGIE DES POLLUTIONS

 

Compte tenu de la diversité des cas rencontrés, on distingue en règle générale deux grands types de pollution :

- les pollutions diffuses, concernant d'importantes surfaces, qui proviennent essentiellement d'épandages de produits liquides ou solides (?). Elles sont également associées aux retombées atmosphériques (envol de poussières à partir de terrils par exemple) ;

- les pollutions ponctuelles, qui ne concernent a priori que des superficies limitées.

 

Parmi les pollutions localisées pour lesquelles on dispose d’informations chiffrées, on peut distinguer deux grandes catégories :

- les pollutions accidentelles, qui proviennent d'un déversement ponctuel dans le temps de substances polluantes. Elles engendrent en règle générale une dégradation brutale du milieu sur une surface limitée. Si aucune intervention n'est réalisée dans un délai relativement court, la pollution peut devenir rapidement catastrophique (ex. : débordement en février 2000 du tailing dam de la mine d'or de Baia Mare en Roumanie et pollution du bassin du Danube) ;

- les pollutions chroniques, correspondant à des apports de substances sur de longues périodes, qui ont souvent pour origine des eaux d'exhaure, des lixiviats et infiltrations issus de dépôts de résidus ou encore des fuites sur des conduites ou sur des bassins de stockage non parfaitement étanches.

 

3. Conclusions

 

Ce cours se veut un outil d'aide à la compréhension des principaux processus à l'origine des pollutions minières. Il permet d'identifier les causes de nuisances environnementales, qu'il est possible de minimiser en mettant en œuvre suffisamment tôt des mesures appropriées.

Parmi ces causes, le contexte géologique du gisement, la nature des minéralisations et les processus géochimiques et biogéochimiques contrôlent les conditions environnementales qui prévalent dans les zones naturellement minéralisées avant toute intervention humaine, ainsi que les conditions résultant de l'exploitation et du traitement du minerai (facteurs anthropiques). Ces derniers en particulier, provoquent des perturbations du milieu naturel en stockant en surface généralement sans précaution, d'importantes quantités de déchets solides à la source d'instabilités

physiques et chimiques durables dans le temps. Celles-ci peuvent à leur tour exercer des pressions sur les ressources naturelles et la biodiversité et provoquer la dégradation d'écosystèmes.

 

Les enjeux liés aux sites miniers abandonnés ou fermés dépassent aujourd'hui le simple cadre du débat public et de la mise en œuvre du « principe de précaution ».

 

Grandes consommatrices d'espace, les anciennes exploitations minières une fois sécurisées et

réhabilitées, peuvent être reconverties ou réutilisées par les collectivités territoriales mais selon des

règles et des procédures qui doivent être précisément définies dans les PPRM.